En 1927, la Compagnie des Chemins de fer du Midi souhaite transformer et étendre la gare de Carcassonne dont la construction remonte à 1857. Les conditions de ce projet sont énoncées dans un document que nous nous sommes procuré auprès d'un collectionneur. Défendons ici le caractère exceptionnel de cette découverte historique, qui n'a pas été évoquée - à notre connaissance - par d'autres chercheurs. Par ailleurs, si cette étude avait été mise en œuvre, elle aurait apporté de profondes mutations dans la vie économique et commerciale de la commune.
La gare de chemin de fer en 1927
Après avoir reçu dans son bureau de l'hôtel de ville, le directeur de la Compagnie des Chemins de fer du Midi, Albert Tomey lui écrit un courrier le 1er août 1927.
"J'ai l'honneur de vous faire connaître que le Conseil municipal serait, en principe, disposé à se substituer à la Chambre de commerce pour la transformation et l'extension de la gare de Carcassonne."
Le maire ajoute cependant, que cela ne se ferait pas sans certaines conditions à apporter au projet technique et financier. En effet, la ville souhaite que la compagnie tienne compte du plan d'aménagement et d'embellissement de Carcassonne. Celui-ci s'articule autour de la construction d'un nouveau port à l'Estagnol, près duquel les vins et le charbon devront désormais être débarqués. Le déplacement du quai des wagons réservoirs, dégagera considérablement l'engorgement sous le pont du Quai Riquet. Par ailleurs, le déchargement des bestiaux pourra rester à la gare.
Quai des vins
Sous le pont de la ligne Carcassonne-Quillan à l'Estagnol, le maire considère que l'élargissement prévu de 8 mètres est insuffisant; il faut tenir compte de l'espace pour les tramway de l'Aude. Une palée séparerait les deux voies afin d'éviter les accidents.
Le projet de la compagnie prévoyait la construction d'une passerelle, allant du quai des voyageurs jusqu'au chemin du cimetière Saint-Vincent. Elle serait passée au-dessus des quai de déchargement. Les riverains s'y opposèrent par pétition en date du 26 juin 1927. La municipalité demanda le creusement d'un souterrain depuis la cour des voyageurs, jusqu'au croisement de l'actuelle rue Buffon et du chemin du cimetière. Avec deux sorties et un éclairage pour la surveillance effectuée de 4 du matin à minuit.
Plan de transformation de la gare de Carcassonne
(Architecte H. Germa - Août 1926)
Le maire insiste également sur la façade de l'actuelle gare, indigne d'une ville touristique comme Carcassonne. Il conviendrait de lui donner l'aspect d'une gare de type provençal ou moderne, comme "certaines dispositions heureuses qui ont été réalisées sur la Cote d'Azur". Effectivement, nous avons trouvé que la gare de Nice, possédait exactement le même aspect architectural que le projet présenté pour Carcassonne. Afin de vous donner une idée de l'aspect qu'aurait pu avoir notre gare, nous avons projeté sur celle-ci, la façade de celle de Nice.
© Martial Andrieu
Photomontage du projet de transformation de la gare
Ce projet achoppera sur l'aspect financier car la municipalité demanda des contreparties à la compagnie, l'estimant seule bénéficiaire des transformations envisagées. La mairie devra à ses frais élargir les trottoirs du pont Marengo, rénover la chaussée de l'avenue de la gare, modifier et élargir les voies d'accès à la gare de l'Estagnol. Le coût supplémentaire pour la ville étant de 700 000 francs. En conséquence, elle exige une surtaxe des voyageurs et marchandises transitant par Carcassonne. Dans ces conditions, les deux parties ne réussiront pas à s'entendre. Une histoire qui semble rappeler pour des raisons identiques, le refus des Consuls de la ville de recevoir le Canal royal du Languedoc au XVIIe siècle.
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