Carcassonne n'en finit plus de faire parler sur la toile. Parfois, d'une manière cocasse, à l'image de l'article du journal Le Parisien - Aujourd'hui en France. Ce dernier relève dans ses colonnes un fait qui semble avoir ému jusqu'à la curie épiscopale. Dans un élan de charité chrétienne, Mgr Vincent, le nouvel évêque du diocèse de Carcassonne, a accepté la sollicitation toute particulière de M. Boissonade, directeur du nouvel hypermarché Leclerc situé à ROCADEST. À la nuit tombante, au moment où le rideau de cette cathédrale consumériste se baisse, Mgr Vincent a procédé à la bénédiction des lieux. Bien que ceci se soit fait en toute discrétion, l'évêché de Carcassonne n'a pas manqué de le faire savoir par les moyens de communication les plus modernes. Cette pratique n'a rien d'extraordinaire en elle. Monsieur Boissonnade a parfaitement le droit à titre privé en accord avec sa sensibilité spirituelle de faire bénir son entreprise. Faut-il encore qu'il soit très apprécié du diocèse pour obtenir la visite de l'évêque. N'importe quel curé aurait fait l'affaire. Depuis le Moyen-âge, les commerçants ont toujours cherché à protéger leurs échoppes. Dans la Bastide-Saint-Louis, il demeure des statues de la vierge dans les façades de vieux magasins. Citons, justement "A la vierge" tenu autrefois par la famille Gastilleur, dans la rue de Verdun. Ou bien encore, le Bazar Combéléran transformé en Monoprix, rue Clémenceau. En vérité, ce n'est pas la sollicitation de M. Boissonade qui interroge. Elle n'enfreint en rien la loi sur la laïcité. C'est plutôt que la bénédiction ait été faite dans le centre commercial le plus décrié de Carcassonne : ROCADEST. Celui qui est accusé de siphonner les commerces du centre-ville. Il n'est pas. certain que l'action de l'évêque soit de nature à ramener les brebis égarées vers la bergerie. On pourrait avec coquinerie réclamer que Mgr Valentin en fît de même pour la Bastide-Saint-Louis.
Le Christ chasse les marchands du Temple.
« Jésus entra dans le temple de Dieu. Il chassa tous ceux qui vendaient et qui achetaient dans le temple ; il renversa les tables des changeurs, et les sièges des vendeurs de pigeons. Et il leur dit : Il est écrit : Ma maison sera appelée une maison de prière. Mais vous, vous en faites une caverne de voleurs. »
(Matthieu, XXI, 12-13)
Si dans l'article du Parisien, M. Boissonade se vante d'être le mécène des bâtiments religieux en restauration, nous rappelons que l'église des Carmes se trouve précisément dans la Bastide. Celle-ci bénéficie actuellement de fonds privés pour sa réhabilitation. Faute de clientèle pour les magasins désormais vidés de leur enseigne, il n'y aura bientôt plus grand monde pour acheter les cierges des Carmes. Pas plus d'ailleurs qu'à Saint-Michel ou à Saint-Vincent. A moins qu'il ne faille bientôt aller les acheter à l'hypermarché Leclerc dans lequel une chapelle sacralisée permettrait d'aller prier. Ah ! La concurrence déloyale n'a pas fini de hanter la Bastide-Saint-Louis...
Le Parisien / 23 mars 2023
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