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Jean Alphonse Coste-Reboulh (1817-1891), illustre bienfaiteur de la ville

Jean Alphonse Coste naît le 24 décembre 1817 à Carcassonne. C’est le fils de Bernard Coste (1780-1848), fabricant de draps à la Trivalle, et d’Elisabeth Cécile Antoinette Reboulh († 1857), fille d’un célèbre apothicaire de la ville. A l’âge de 17 ans, Jean Alphonse est envoyé à l’école militaire de Sorèze où il fait la connaissance du père Lacordaire. Pendant le cours de ses études de droit à Toulouse et à Paris, il fréquente assidûment les musées, les ateliers des peintres de renom et termine son éducation artistique par un voyage en Italie.

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© Musée des Beaux-arts de Carcassonne

Jean Alphonse Coste en habit de Sorézien

De retour à Carcassonne, il fait bientôt partie de la Société des Arts et des Sciences et suit avec ardeur les travaux de restauration de la cité médiévale entrepris par Eugène Viollet-le-duc. A cette époque, Alphonse Coste vient d’hériter de la fortune de son oncle maternel Dominique Reboulh (1770-1838), pharmacien de son état. Le neveu dans la demeure du Bastion Montmorency à Carcassonne au milieu des tableaux conservés par feu son oncle, ancien dignitaire de la loge maçonnique Napoléon. Les vestiges de ce temple se trouvent encore dans l’ancienne chaufferie du Bastion ; on attribue les peintures symboliques qui décorent ses murs à Gamelin fils, lui-même franc-maçon.

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© Musée des Beaux-arts de Carcassonne

Jean Alphonse Coste et sa mère Madame Reboulh en 1855

Le 6 juin 1859, Jean Alphonse Coste qui adjoint désormais le nom de Reboulh à son patronyme, se marie avec une jeune femme de dix-sept ans sa cadette. Il s’agit de la fille d’un marchand de draps, nommée Anne Théonie Dussau. Il partage alors son temps entre Carcassonne et son château de Fontiès d’Aude où il créée l’année suivante cinquante hectares de vignes et neuf ans après, une cave pour produire du vin. C’est l’époque à laquelle le département de l’Aude se tourne vers l’exploitation viticole, après avoir été jusqu’à la fin du XVIIIe siècle la plaque tournante du commerce drapier. A l’abri des problèmes matériels, Alphonse Coste-Reboulh vit de ses rentes  et commence à développer sa propre collection d’œuvres d’art. Au sein de la Société des Arts et Sciences de Carcassonne dont il sera le président, il produit plusieurs études sur la recherche historique. N’occupe t-il pas également les fonctions d’Inspecteur de la Société française d’archéologie pour le département de l’Aude ? A ce titre, les pièces de monnaie romaines qu’il découvre à Fontiès d’Aude vont enrichir le médailler conservé au musée des Beaux-arts. « Répandre l’instruction, développer l’intelligence et le goût, est certainement le premier devoir d’un peuple libre, écrit-il. »

A Coste-Reboulh il ne manquait rien, mis à part sans doute de se lancer dans une carrière d’élu local, avec si possible des ambitions plus nationales. Son opposition au gouvernement impérial et son appel à voter contre le plébiscite, lui permettent de se hisser du côté des partisans de la République au soir du 4 septembre 1870. Il entre au conseil municipal l’année suivante avec Théophile Marcou et n’en sortira qu’en 1881. Entre-temps, avec le soutien du Parti Républicain il se fait élire par deux fois (1871 et 1874) comme conseiller général du canton de Capendu et occupe les fonction de maire de Floure. En 1880, Marcou va lui faire payer d’avoir voulu se faire élire sénateur et surtout, d’avoir osé se porter candidat à la mairie de Carcassonne. Là, où le journal la Fraternité encensait autrefois Alphonse Coste pour ses qualités de fervent républicain, une campagne de dénigrement s’abat désormais sur lui. Au sein de son parti, Marcou place Théron à Capendu afin d’éjecter Coste, désormais suspecté de marchandages avec la droite réactionnaire. Les délégués désignent à l’unanimité Ferdinand Théron ; le conseiller général sortant maintient sa candidature. Au mois d’octobre 1880, Alphonse Coste ne recueille qu’un tiers des voix contre deux tiers à son adversaire.

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Une ferme dans les bois

(Pelouze Léon Germain)

A l’âge de 71 ans, Coste-Reboulh rédige un testament dans lequel il désigne son cousin, Charles Coste, magistrat à Toulouse, comme son légataire universel. Le 28 avril 1888, ses dernières volontés sont enregistrées chez Me Mouton. Outre l’héritage qu’il laisse à son cousin, il prend la résolution de léguer sous conditions à la ville de Carcassonne, tous les livres de ses deux bibliothèques à Fontiès et à Carcassonne, tous les tableaux et portraits à quelques exceptions, quatre-mille francs pour la création d’une galerie portant son nom dans les musée des Beaux-arts.

« Je lègue à la ville de Carcassonne tous les livres formant ma bibliothèque du château de Fontiès d’Aude et celle que je possède à Carcassonne, à la condition que tous ces livres seront remis en un lot séparé, dans les salles de la bibliothèque municipale, dans les bois qui contiennent avec inscription de mon nom sur les faces.

J’ajoute encore le don de tous les tableaux qui figurent aux château de Fontiès d’Aude soit en mon habitation à Carcassonne, en y ajoutant les aquarelles, gouaches, dessins, gravures, bronze et étains, porcelaines, faïences, marbres, verrerie, fers, bois sculptés, armes, albums et quelques pièces d’argenterie anciennes telles qu’un moutardier louis XIV, petit plat argent repoussé, travail allemand, bénitier, deux boites à mouches, bougeoir, deux étuis en or et trois tabatières or d’inégales grandeurs, le tout dans une des vitrines de mon cabinet.

Tous les portraits de la famille Coste-Reboulh que je possède, huiles, aquarelles, dessins, seront formellement conservés par la ville et figureront dans la salle réservée à cet effet au musée.

Tous les objets énumérés ci-dessus sont donnés à la ville de Carcassonne à la condition expresse, qu’une salle spéciale sera réservée dans le musée de la ville pour recevoir toutes ces œuvres et que cette salle portera à perpétuité le nom de galerie Coste-Reboulh. Si la ville de Carcassonne n’acceptait pas le legs aux conditions exprimées ci-dessus, mon héritier universel prendrait possession des objets légués.

Mon héritier devra donner à la ville de Carcassonne une somme de quatre mille francs pour approprier dignement la salle qui contiendra ma collection et qui portera le nom de galerie Coste-Reboulh.

P.S : J’ajoute que mon hériter comprendra dans le legs que je fais à la ville de Carcassonne, les pendules et appliques en bronze doré ainsi que les chenets qui ont un grand cachet artistique en y comprenant aussi les flambeaux et les lustres dans des conditions identiques. »

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Intérieur de bergerie

(Palizzi Guiseppe)

Lorsque Jean Alphonse Coste dit Coste-Rebouhl s’éteint le 13 juillet 1891 à Fontiès d’Aude, la ville de Carcassonne est informée du legs que le défunt lui a fait. Au mois de septembre, le conseil municipal accepte la succession aux conditions énoncées dans le testament. Le 6 novembre 1891, elle charge M. Alary de procéder à l’inventaire et à l’estimation des objets légués par M. Coste-Reboulh. Ce dernier s’entoure de MM. Emile Roumens (conservateur du musée), Caselli (Galériste), Izard (conservateur de la bibliothèque municipale) et Achille Rouquet. Madame Dussau veuve Coste qui pouvait continuer à bénéficier des objets jusqu’à sa mort, permet à la ville de s’en saisir de suite. L’inventaire ainsi dressé fait état de soixante tableaux ; soixante-et-dix aquarelles, dessins et gravures ; 600 pièces (faïences, porcelaines, bronzes…) ; 1934 volumes de littérature, histoire, art moderne, parmi lesquels des ouvrages de grand luxe. L’estimation s’élève à un montant total de 41329 francs.

La ville votera un crédit de 12000 francs pour régler les droits à l’état (15%), l’expertise et le supplément pour la création de la galerie Coste-Reboulh.

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Reboulh de Rougepeyre

(Le Bouteux Pierre Michel)

Galerie Coste-Reboulh en 1894

Tableaux

Matinée brumeuse sur l’Oise (Beauverie Charles-Joseph), Portrait d’un conventionnel (Boilly), Scène tragique dans une hôtellerie (Adrian Brouwer), Louis XV et Madame du Barry au Petit-Trianon (Caraud Joseph), L’Elysée-Cottin à Bigorre (Chartier Pierre), La nuit verte (Emile Dardoise), Promenade du matin (Devé Eugène), Dans la prairie (Dupré Julien), Le crucifiement et Tête de femme pleurant sur son enfant (Gamelin Jacques), Une gorge des montagnes d’Arets à Rochefort-en-terre (Joubert Léon), Les premiers rayons (Jundt Gustave), Portrait de Reboulh de Rougepeyre (Le Bouteux), Jupiter et Antiope (Le Corrège), Convoitise (Monginot), Intérieur de bergerie (Palizzi Guiseppe), Une ferme dans les bois (Pelouze Léon-Germain), Vue de la Cité de Carcassonne, Fruits, Portrait de M. Coste-Reboulh (Roumens Emile), Les deux amis (Rousseau Philippe), Avril, La vallée de la Sée (Ségé), Temps gris, Le crépuscule (Séon Alex), Ferme (Van Goyen), Marine (Van de Velde), Paysage avec silhouette d’homme et de femme se découpant sur le ciel (David, peintre flamand), Enfants à la balançoire, Portraits de femme, Nature morte, Portrait d’un jeune homme, Vue d’une ville hollandaise, Paysage avec animaux, Alexandre cédant sa maîtresse Campaspe à Apelles (Peintres inconnus).

Hors présentation

Incroyables (A. Morlon), Veaux (Debat-Mousan), Portrait (Bailly), Dans la prairie (Dupré Julien), Etude (Lancger), Vanderveld, Lambrecht, Jean Jalabert, Reboulh de Bourges, Adrian Brauwer, Poules (Cottin), Le moulin (Breton Emile), Collin-maillart (Lancret), Le chevaux ( Van de Velde), Paysage (Rapin), L'abreuvoir (Ponsan-Débat)

Dessins, gravures, etc

Berger de l’Herzégovine (Bida), Un Hongroise (Salières Narcisse), Marine (Wyld), Portrait de M. Coste-Reboulh (Alary Raymond), La ronde de nuit (Rembrandt), Manlius et son fils (Gamelin père), Deux tableaux avec troupeaux (Buttura), Une rue de ville espagnole (Engalières), Saison de fleurs (Inconnu), Vue d’une port italien (Charles de Tournemine), Portrait de Vélasquez (Inconnu).

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En 1916, une deuxième partie du legs fut installée dans des vitrines de la galerie Coste-Reboulh par Léon Cabanier, conservateur du musée. Il s’agit de porcelaines, de pendules anciennes… 

Il nous semblait important de réaliser la biographie de cet homme qui ne représente dans l’esprit des Carcassonnais que le nom d’une rue qui lui fut donné le 7 novembre 1902, soit 11 ans après son décès. Nous espérons avoir enrichi la connaissance de cet illustre bienfaiteur de la ville.

Sources

Bull. Société française d'archéologie / 1891

Testament Coste-Reboulh / 1888

Délibérations CM de Carcassonne / ADA 11

Etat-civil / ADA 11

Le courrier de l'Aude / La fraternité

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Commentaires

  • Dans ma lointaine Alsace,je commence à en savoir plus sur Carcassonne que les carcassonnais eux-mêmes
    Je me régale à chacun de vos envois.
    Le grand nombre quasi journalier de vos écrits me rassure sur votre sante, je ne vous demanderai donc pas comment vous allez et si le confinement se passe bien.
    Mais prenez quand même bien soin de vous
    Amitiesavoir
    Dorah

  • Merci beaucoup, Vous avez enrichi ma connaissance sur cet illustre bienfaiteur de la ville qui a donné son nom à la rue de la Grille que j’empruntais si souvent sans savoir qui se cachait sous le nom de Coste-Reboulh. Un vrai plaisir de vous lire.

  • Trés bien, je ne connaisais pas du tout l'héritage magnifique légué à la ville de Carcassonne. Tout vos articles sont passionants.

  • Merci pour toutes ces informations sur ce généreux donateur. Merci encore pour vos recherches. sur la région.

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