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Souvenirs du quartier des Capucins (Acte 2)

Les mères de famille se rendaient chaque jour à l'épicerie, afin d'acheter les denrées indispensables à la réalisation du repas du midi. On ne faisait pas de réserves à l'époque ; cette visite permettait de faire un brin de causette. Les produits étaient le plus souvent vendus en vrac et en petites quantités. On trouvait les légumes secs dans de grands sacs de jute, posés au sol ; l'huile dans un baril avec un robinet ; le sucre, dans un tonneau ; le café, dans un bocal. La ménagère n'avait pas besoin de grandes quantités : 1/4 de litre d'huile, 1/4 de café, 1/2 livre de sucre. Une moulinette servait à raper les 50 grammes de gruyère et parfois, on se retrouvait avec des morceaux de la croute... Le beurre était protégé des mouches par un tulle  ; il était débité au moyen d'un fil de fer tendu entre deux tiges de bois. Une fois à la maison, on le conservait dans un bol à l'abri de l'air recouvert d'eau qu'il fallait remplacer tous les jours. Les frigidaires n'existaient pas encore et les quelques glacières contenant de la glace étaient rares dans les maisons.

Les capucins années 30.jpg

Une grosse boite contenait des sardines vendues à l'unité. On apportait une assiette et on en demandait une ou plusieurs : "Si tu veux, mets un peu d'huile en plus, ça fera saucer le pain." Un jour une maman dit à son fils : "Tiens, va t'acheter une sardine. Fais attention !" L'enfant achète sa sardine que l'épicière lui enveloppe dans du papier ; il revient, triomphant à la maison serrant précieusement son achat dans sa main, mais, hélas, la mère, dans le papier ne trouve rien. La sardine avait glissé et s'était sauvée... dans le ruisseau.

Dans ces épiceries, on y trouvait aussi du savon de Marseille, de la soude, de l'eau de Javel, du cirage, des bougies, etc...

La morue

Le vendredi, dans de nombreux foyers, on mangeait de la morue. Le matin, ce poisson très bon marché était vendu séché et salé trempant pour le dessaler depuis la veille dans une bassine d'eau. Elle était installée bien en vue à l'étal du magasin.

Le laitier

À la tombée de la nuit, paraissait chaque soir le laitier. M. Dedieu arrivait à la porte en s'annonçant : Me voilà ! Me voilà ! Parfois c'était Madame Pujol, aidée par sa fille Georgette et une copine.

Les boulangeries

Dans les années 1930, il y avait quatre. Trois dans la rue Neuve du mail : Bonnafil, Alazet et Castel. Une rue des Arts qui disparut suite à l'incendie de sa maison : Lannes. 

Qu'elles étaient aimables et souriantes nos boulangères Mesdames Bonnafil et Castel. Par contre, Mme Alazet, grande silhouette sèche comme un sarment, était peu affable et ses pains pâlots ; il est vrai qu'avec son mari malade et le magasin vétusté, rien ne pouvait porter à la gaité. Que dire de nos boulangers, auréolé de cheveux flamboyants et Joseph Castel, affichant une certaine corpulence, presque toujours en tenue de travail : tricot de flanelle sans manche, ceint autour des reins d'un pagne lui servant de tablier. Son rituel cri de ralliement en frappant ses mains enfarinées : "Juju ! Il y a du monde." Et les pains ! Boules de 2 kg - jusqu'en 1939 - achetées surtout par les ouvriers agricoles du quartier. Il allaient  travailler à la plaine Mayrevieille et emportaient le pain pour le casse-croute. 

Après la Seconde guerre mondiale, les pains ont diminué de poids. Un travailleur de force avait droit à 550 grammes par jour en 1942. On consommait aussi la fougasse ou fouasse, puis le Charleston. Les fours était chauffés au bois. En 1932, arriva le mazout qui, bien que pratique incommodait le voisinage. Bonnafil fut le premier à utiliser le gaz pour son four, mais la nationalisation de la compagnie du gaz fit augmenter les tarifs. On revint alors au mazout. 

S'ajoutaient quelques pâtisseries boulangères : gâteaux à l'anis, gâteaux aux fritons, gâteaux à la courge. Enfin n'oublions pas la procession des plats que les mères de famille apportaient, en fin de matinée, chez le boulanger : macaroni au gratin, tomates farcies, etc... Ceci afin qu'ils les mettent au four encore chaud, plats que l'on venait rechercher religieusement à l'heure du repas. Il faut aussi rappeler que sous le four, se trouvait une étuve : on apportait dans un sac du duvet de canard ou de pie, pour faire sécher et empêcher les mites de s'y installer. Le duvet servait par la suite à garnir des coussins et même des oreillers.

Les fêtes

Si dans les années 1932-1933, organisées par les membres de la Boule joyeuse, avaient lieu des festivités au Café des Américains (boulevard Barbès), c'était uniquement la fête du boulevard Barbès. C'est après la guerre que fut créée la fête du quartier des Capucins grâce à Antonin et Lucie Lavigne (habitant rue des Rames), Camarasa et son épouse aidés par les prisonniers libérés et les jeunes des Chantiers de jeunesse. Il faut également compter sur Alliaga dit "Le pacha" qui habitait dans la rue Fortuné avec sa femme et sa fille.

Char. Quartier des Capucins.jpg

Outre la fête en elle-même avec son orchestre, dont nous avons évoqué le souvenir dans l'acte 1, d'autres réjouissances burlesques s'ajoutaient à l'évènement. 

Une pittoresque noce avec des invités déguisés avec dans les premiers rôles, Marius Ramon, Antoine Rouzaud et d'autres gais lurons ; un numéro de cirque avec Aliaga en dompteur juché sur une plate forme, face à Franco  en bête sauvage crachant du feu. Une autre année, toujours Aliaga, en Pacha et auprès de lui, chargé de l'éventer avec une grande feuille de palmier, Lucien, vêtu d'un pagne et barbouillé de noir de la tête aux pieds. Le cheval de Castel transformé en zèbre dont la pluie, malheureusement, détruisit le chef d'oeuvre pictural. Il y eut Joseph, recroquevillé et couché ans un landau, habillé en bébé, coiffé d'un bonnet brodé et à la bouche, une sucette géante. Il fut promené dans les rues par Ségura, déguisé en nounou.

Une fois, une tombola fut organisée dont le lot était un petit cochon, qu'un brave homme, un peu naïf, promenait dans une petite carriole, dans les rues du quartier et dont il avait la surveillance. Un matin, on lui fit une petite plaisanterie en lui disant : "Pobro amic, nous ont panat lé porc ! D'émotion, le pauvre gardien tomba par terre, raide... disons... dans les pommes. Les plaisantins n'avaient plus envie de rire, heureusement, tout se termina bien. La fête fut interrompue une année ; il y avait eu un décès. Me Pailhès, huissier, habitant rue Alba, s'était noyé en faisait de la plongée sous-marine. Il régnait dans ses soirées, une chaleureuse et amicale ambiance entre toutes les générations ; tous s'en donnaient à coeur joie, dans une gaieté générale.

Ces souvenirs sont extraits du travail de Simone Dariscon

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Commentaires

  • excellent article ! merci
    ce qui s'appelle le devoir de mémoire !

    "Camarasa et son épouse" étaient-ils instituteurs ?

  • Au bon lait
    Chez Pujol Roger
    Qui le goûte un jour y revient toujours

  • Camarasa était tailleur de pierres ,et " funéraire " à l'angle de la rue du 24 Février et de la montée St Michel, très bien pour voir l'embrasement
    Ils habitaient rue des Rames .

  • Un vrai contraste avec les quartiers d'aujourd'hui qui semblent vidés de tout habitant.
    La solidarité et le partage existaient, la vie s'y épanouissait. Aujourd'hui on y rencontre que des volets clos et des véhicules rangés devant les portes si importants pour aller chercher sa baguette de pain !

  • Au bon lait
    Chez Pujol Roger
    qui le goûte un jour y revient toujours...
    Le fromage blanc était excellent. Je me demande ce qu'est devenu Popo le fils...

  • Peut-on lire le travail de Mme Simone Dariscon dans sa totalité? Est-il publié? Je sus sûre qu'un bon nombre seraient intéressés.

  • Ce travail n'a pas été édité. Le texte a été dactylographié et mis à la disposition des membres d'une association des riverains des Capucins.
    J'en possède une photocopie.
    Martial

  • Au dire de certains anciens des années 30 / 40 , les " chiques " de Mr Castel , se retrouvaient quelquefois dans la mie !!!!!

  • Madame Dariscon m'avait remis un exemplaire de son ouvrage dactylographié : "Quartier des Capucins. Sa création au XIXéme siècle, son extension, sa population, artisans, ses commerçants, son patrimoine culturel!!!quelques souvenirs..." . J'en ai fait des tirages que j'ai communiqué ,à la demande,au prix coûtant, à des membres de l'association des Amis des Capucins dont je fais partie. Il m'en reste des copies. Vous pouvez me contacter par mail si vous en désirez une.

  • merci pour ce renseignement !

    (il y avait un couple nommé "Camarasa" à Montazels, originaire de Carcassonne et instituteurs)

  • Bonjour,
    Je suis née aux capucins chez mes grands parents 66 rue du 24 février, je réponds au com sur Popo Pujol, je l ai croisé il y a quelques mois à inter marché avec sa femme, mais je ne l ai pas interpelé, il ne m aurait pas reconnu, moi oui.

  • Bonjour
    Vous êtes parents de Mme cadenat?

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