Cité 2
Nous allons voir comment le G.I.E Puech Mary (Groupement d'intérêt Économique) a développé à Carcassonne le tout premier centre commercial de la ville.
Ce projet est d'abord né d'une rencontre entre M. Jean Richardis, commerçant Lézignanais en électroménager, et M. Robert Briaut, propriétaire d'un commerce alimentaire nommé SOLADI. La Société Languedocienne de Distribution avait à sa tête trois épiciers de Limoux, Carcassonne et Bram ; respectivement MM. Henri Falcou, Robert Briaut, Marcel Riu. Le siège se trouve 66, rue Antoine Marty à Carcassonne.
À la fin des années 60, le modèle américain des grandes surfaces émerge en France et fait trembler les petits épiciers. Jean Richardis raconte à Robert Briaut son séjour aux États-Unis durant lequel il a visité les collectifs indépendants ; regroupement de plusieurs commerçants. Il s'agit de vendre avec beaucoup de stocks sur des marges moins importantes. C'est cette idée qui va germer dans la tête de ces deux hommes entre 1969 et 1970, afin de réaliser une affaire de ce type à Carcassonne.
Le triumvirat à la tête du futur Conseil d'administration du G.I.E Puech Mary est ainsi constitué : Maurice Gally (Président), Robert Briaut (Vice-président) et Jean Richardis (Trésorier). Ce dernier est chargé de monter le financement de l'opération grâce aux aides de la Caisse des marchés d'état, sise rue du 4 septembre à Paris. Le but était de préserver le commerce de Carcassonne pendant 7 ans. Le G.I.E est enregistré le 24 avril 1971 au registre du commerce pour une durée de 20 ans, avec un capital de 5200 francs. Son siège est dans les locaux de la SOLADI.
La construction
Le permis de construire est délivré le 7 juin 1971, après l'achat de plusieurs terres agricoles en dehors de la ville appartenant à différents propriétaires. À cette époque, les fondateurs ont été jugés comme irresponsables d'aller bâtir un commerce si éloigné de la ville. L'avenir leur a donné raison, puisque l'autoroute A61 (construite en 1979) et la rocade sud (en 1980) renforceront cette zone dans l'axe de la RN 113. Le chantier de 12 000 m2 est confié à l'entreprise Escourrou. La première est posée le 13 octobre 1971 en présence du préfet de l'Aude, du maire, du président de la Chambre de Commerce et du directeur de la CNME. L'investissement collectif aura coûté au total près de 13 millions de nouveaux francs. L'inauguration a lieu le 2 mai 1972.
Le magasin
À l'intérieur, ce sont 33 commerçants indépendants qui occupent l'ensemble de la surface de vente. Parmi eux, on peut citer : Gally (libraire), Noubel (Meubles), SOLADI (Alimentation), Laffargue (Sport), Cazaniol (Droguerie), Montsarrat (Luminaires), Guilhem (Téléviseurs et radio), une banque, un auto-center, coiffeur, tabac, fleurs... Une cafétéria (Le maillon) dirigée par M. Fraisse est exploitée par la Société hôtelière Cité 2 créée en mai 1972. Elle distribue également 1500 repas aux collectivités.
Pour la première année, le loyer moyen au m2 est d'environ 150,00 francs H.T.
Le groupe Jobino à l'Alligator en 1980
Une salle de décompression accueillait les expositions et les soldes, mais afin de la rentabiliser elle fut transformée et exploitée en discothèque. D'abord, ce fut "Le carignan" puis "l'Alligator", géré par Louis Gleizes qui aujourd'hui veille sur le restaurant L'escalier, boulevard Omer Sarraut.
La direction
Le Conseil de surveillance engagea d'abord comme directeur M. Xavier Verley. Puis... un homme du Béarn fit le voyage jusqu'à Carcassonne pour répondre à l'annonce. C'était Bernard Péré-Lahaille qui n'est jamais reparti et a remplacé le directeur nommé.
© Christophe Barreau
Bernard Péré-Lahaille (1948-2011) fut aussi le fondateur d'UCCOAR
La crise
"Cité 2" fête du 29 avril au 7 mai l'anniversaire de ses cinq ans. C'est l'occasion de dresser dans la presse un bilan de cette période ; elle a permis faire quadrupler le chiffre d'affaire. Tout les voyants sont au vert et le magasin emploie près de 100 personnes. Il n'a aucune concurrence, mais la donne va bientôt changer avec la construction de l'hypermarché "Leclerc" à Félines en 1978 et de "Mammouth" à la Bourrette en 1981. À cela il faut ajouter, la crise économique qui n'épargne pas Carcassonne.
Cité 2 a besoin à la fin des années 70 de se restructurer d'urgence pour faire face à de nouveaux enjeux mettant en péril sa survie ; quitte à renoncer à quelques principes. Le G.I.E dépose un nouveau permis de construire en 1980 afin de s'agrandir. La demande porte sur la modification des façades et de leurs coloris ; une suppression d'exploitation de la mezzanine laquelle sera démolie alors que 500 m2 de locaux techniques seront construits à l'arrière du bâtiment.
On fait valoir l'exiguïté de la surface de vente consacrée à l'alimentation (2500 m2) par rapport à la surface totale (12.000 m2) qu'il souhaite élargir ; la trop grande importance donnée aux indépendants qui occupent 50% de la surface de vente ; l'entente de non concurrence entre les commerçants qui interdit à l'alimentaire de pratiquer une politique de prix agressive. Autre argument de poids, la direction indique qu'elle se séparera de 40 employés si elle ne peut obtenir d'autorisation d'agrandissement, à cause de charges trop élevées. En revanche, elle embauchera 50 employés supplémentaires dans le cas inverse.
La Chambre des métiers de l'Aude vote dans un premier temps en défaveur de l'extension, le 29 avril 1980. Elle considère qu'elle ne sera qu'au seul bénéfice de la SOLADI qui triplerait ainsi sa surface consacrée à l'alimentaire. Cité 2 finira par obtenir son permis de construire en 1982 ; "Mammouth" lui intente un procès pour le faire annuler en octobre 1982 estimant que la SOLADI n'a pas le doit d'étendre sa surface de libre service dans la mesure où la commission d'urbanisme n'a pas été consultée.
La fin de Cité 2
Au milieu des années 80, la G.I.E dépose les armes et vend Cité 2 à l'enseigne Euromarché. En 1989, la société Rallye rachète Disque bleu (5 milliards de Francs de C.A) qui détient 7 Euromarché en France dont celui de Carcassonne. En 1995, c'est le groupe Casino qui gobe Rallye et qui s'installe désormais à Géant Casino Cité 2. Après 43 ans, le nom de Cité 2 règne encore à Carcassonne.
Sources
Merci à MM. Richardis et Gally pour leurs souvenirs
Merci à Jacques Blanco pour son concours
ADA 1539W82
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Commentaires
L'implantation de ces grandes surfaces, a fait disparaître de nombreux "petits" commerçants que les clients, jusque là, n'hésitaient pas à déranger, pour une tablette de beurre ou autre bricole, les dimanches ou jours fériés si par malheur ils avaient la mauvaise idée de fermer ces jours-là pour profiter d'un repos dominical bien mérité et pour peu que leur habitation soit sur le lieu du commerce.
Quant aux autres, ceux qui ont résisté non sans mal face à cette concurrence, ils se sont vus traiter de voleurs. Leurs prix d'achats étaient parfois plus élevés que le prix de vente de ces grandes surfaces et ne pouvaient donc pas rivaliser. Combien de fois a-t-on entendu dire des "petits" qu'ils "vendangeaient" ou qu'ils étaient des voleurs alors qu'ils pratiquaient des marges très serrées pour essayer de survivre !
Pensant faire des économies grâce aux prix pratiqués par les grandes surfaces, les additions se sont bien alourdies pour les consommateurs
qui, face à des prix réduits et à la profusion des articles, sont pris d'une frénésie d'achats qui dépassent largement leurs besoins et vide les porte monnaie dangereusement. Mais là encore, pour garder les consommateurs dans leur filet, ils ont trouvé la solution: le crédit à la consommation.
Face à une population qui s'appauvrit, on peut évidement accuser l'augmentation du coût de la vie, la stagnation des salaires mais on oublie la débauche de consommation à laquelle on nous a formé (ou déformé). https://zero-gachis.com/quelques-chiffres
Je travaille a cite 2 depuis 1978 mon pere travaillait dans la societe qui a relise le toit de cet hyper. Je suis emue par cet historique. Vous pouvez me contacter a geant au 04 68 11 94 00 merci pour ce saut dans notre histoire . Dominique
Y ais travailler de 1979 a 1983