Nous poursuivons nos biographies inédites des maires de Carcassonne dont on n’a jamais évoqué le souvenir avec Jean François Charles Isidore Léon Dougados, plus communément appelé Isidore. Né à Conques-sur-Orbiel lé 12 janvier 1818, il est le fils François Dougados, propriétaire, et de Marie Vialatte.
Jean François Dougados, dit Venance
Ce qui pourrait intéresser de nombreux lecteurs, c’est sa filiation avec Jean François Dougados dit Venance (1762-1794), poète et révolutionnaire bien connu de nos historiens qui finit sur l’échafaud. En effet, le père d’Isidore - Jean Dougados, régent des écoles à Villegailhenc - était le frère de Venance. Une biographie de ce dernier écrite dans Mosaïque du Midi en 1841 par Isidore Dougados, rend hommage à son oncle.
Isidore Dougados débute sa carrière d’avocat à Carcassonne en 1844 puis devient bâtonnier du barreau de la capitale audoise. Impliqué dans la vie publique et fortement apprécié de ses pairs pour ses talents d’orateur et de fin lettré, ses opinions politiques seront difficiles à cerner. En 1848, après la chute de Louis-Philippe, Dougados se rapproche des socialistes avant d’entrer par la suite au parti conservateur. Sous le Second Empire, il adhère au plébiscite de mai 1870 ordonné par Napoléon III, mais avec la fin du bonapartisme le neveu de Venance fait un retour vers la Monarchie. Aux élections du 8 juillet 1871, il soutient la candidature du légitimiste Ouvrier de Villegly. En octobre, il est battu dans le canton de Conques par Amédée Bausil.
Deux ans plus tard, il donne son patronage aux candidatures bonapartistes de Peyrusse et de Castel. Bref, Isidore Dougados obtient la confiance de tous, sauf celle des Républicains. Aussi, lorsqu’en 1874 la ville de Carcassonne se cherche un maire et que le préfet de l’Aude se heurte à plusieurs refus de candidatures, Isidore Dougados accepte en dernier recours. Il est alors nommé par le gouvernement dit de l’Ordre moral, par le maréchal Mac Mahon, Président de la République, en vertu du décret du 25 février 1874. Il s’entoure des adjoints Paul Vidal (Capitaine en retraite) et Guiraud Cals (Architecte diocésain et inspecteur des monuments historiques). Le gouvernement de l’Ordre moral fondé sur la coalition des droites, prépare la troisième Restauration qui verrait bien le Comte de Chambord accéder au trône de France. En fait, il s’agit d’une gouvernance liberticide et réactionnaire dont la municipalité Dougados va faire les frais.
Patrice de Mac Mahon
Le 31 mai 1876, Isidore Dougados écrit à ses administrés qu’il remet sa démission de maire au Président Mac Mahon. Déjà, au mois d’avril, il avait considéré que son autorité était contestée suite à des déclarations ministérielles sur la loi des maires. La ville sera administrée provisoirement par trois conseillers municipaux dans l’attente d’une nouvelle nomination. Après son départ de la mairie, l’ancien premier magistrat poursuivra ses activités d’avocat et de Juge suppléant au tribunal civil. Membre de la Société des Arts et des Sciences de Carcassonne, il rédigera plusieurs mémoires de grande valeur. Citons, pour exemple en 1856 : "Le dernier Juge-Mage en la Sénéchaussée et siège présidial de Carcassonne."
De son mariage avec Julie Lucie Cayrol (fille de l’architecte), naîtront deux fils. Le premier, Jules, sortira premier de sa promotion à l’école polytechnique en 1877 et fera sa carrière comme ingénieur des Mines à Rive-de-Gier. Le second, Henri, embrassera la carrière d’avocat à Rodez.
Le 20 mars 1885 s’éteignit à Carcassonne Isidore Dougados. Lors de son inhumation, on notera l’absence de réprésentants du conseil municipal et de la préfecture. Les temps politiques avaient changé et on considéra que l’ancien maire n’avait jamais été Républicain. Son corps fut enseveli au cimetière Saint-Vincent où il repose encore de nos jours dans l’anonymat le plus complet. Nous avons découvert sa filiation avec Venance Dougados, mais peut-être que certains en avaient connaissance. Dommage que le rapprochement n’ait pas été fait.
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