Il y a maintenant près de six ans, je me lançais une aventure un peu folle. Celle de faire découvrir l'histoire et la richesse musicale d'un compositeur de musique Carcassonnais, qui jusque-là n'étaient connues que d'une poignée de mélomanes. Au premier rang ceux-là, citons Georges Bruyère qui n'a jamais ménagé sa peine pour tenter avec les moyens de son époque, de faire connaître Paul Lacombe. Déjà en 1984, il avait organisé un concert de qualité dans la cour du Musée des Beaux-arts, qui faute de soutiens de la part de la municipalité d'alors, avait fait pschitt. Dans les compte-rendus de la presse locale, du temps où elle faisait encore des articles sur la musique classique, on peut lire que le public Carcassonnais avait accueilli cette aubade avec la fraîcheur élitiste d'un snobisme à l'esprit de brochure. Rassurez-vous ! Le type même de poncifs sur le caractère mineur d'une musique qui n'atteindrait pas les hautes sphères de l'art Mozartien, a traversé les décennies à Carcassonne dans la mentalité des acteurs culturels.
Rendez-vous
Dans les premiers mois de l'année 2010, Monsieur Alain Tarlier, tout récemment élu à la tête de la Communauté d'Agglomération et comme adjoint à la culture, me recevait dans son bureau. Je remercie par ailleurs Marie-Aude Lapasset qui m'a obtenu ce rendez-vous. Je lui exposais mon projet culturel autour de Paul Lacombe avec détermination ; cela suscita une écoute attentive et intéressée de la part de mon interlocuteur, tant il nourrissait d'ambition pour une autre culture à Carcassonne. Notamment pour un Festival de Carcassonne qu'il jugeait trop commercial. Paul Lacombe tombait à point nommé dans le type de projet qu'il souhaitait mettre en place durant les rendez-vous culturels estivaux. Peu de temps après, je rencontrais Monsieur Mercadal ainsi que le directeur du conservatoire. Un catalogue des oeuvres et des partitions se trouvant à la bibliothèque leur était donné. Je sortais de là avec un immense espoir. J'avais été écouté, serais-je entendu ?
Mon projet en 2010
Présentation
Paul Lacombe est le plus remarquable des compositeurs carcassonnais de l’histoire de notre ville et il me semble injuste qu’aujourd’hui son nom ne reste associé qu’à une école ou une rue.
Fils d’un industriel du drap il naît le 5 juillet 1837 et présente dès son plus jeune âge de réelles dispositions pour la musique. Il va profiter de l’arrivée d’un ancien élève du Conservatoire de Paris du nom de François Teysseyre. Ce dernier, aidé par la municipalité crée la première école de musique et de chant avec les buts suivants : « une classe de chant destinée aux ouvriers, aux enfants indigents, à tous ceux qui, avec des dispositions naturelles pour la musique, n’ont ni le temps ni les moyens d’en apprendre même les éléments. » Lacombe, grâce à ce professeur, va apprendre tous les éléments nécessaires pour devenir un compositeur chevronné. Il devient ami avec Georges Bizet qui lui prodigue des conseils compositionnels et entre après la guerre de 1870 dans la Société nationale de musique créée par Camille Saint-Saëns. Ses compositions sont alors jouées à la Salle Pleyel, aux concerts Pasdeloup, au Conservatoire national de musique mais aussi en Allemagne et aux Etats-Unis. Refusant de s’établir à Paris et préférant demeurer à Carcassonne malgré le succès qui lui tend les bras, il reçoit comme Joe Bousquet cinquante ans plus tard ses amis chez lui en face du square Gambetta : Massenet, d’Indy, Fauré, Chabrier… Sa musique est couronnée à plusieurs reprises et Lacombe est élu comme correspondant de l’Institut et à la Société des Beaux arts. En 1902, il est Chevalier de la légion d’honneur et décède en 1927 à Carcassonne à 90 ans.
Pourquoi un tel projet ?
A l’instar des villes comme Pamiers, St-Etienne, St-Félix Lauragais, St-Jean de Luz qui honorent chaque année avec un festival de musique leurs célèbres compositeurs : Gabriel Fauré, Jules Massenet, Déodat de Séverac, Maurice Ravel… Il s’agit de réhabiliter la musique et la mémoire d’un carcassonnais célèbre et injustement oublié par sa ville.
Un constat accablant
Un nombre conséquent de partitions de Lacombe misérablement archivées se détériorent chaque jour dans les réserves de la bibliothèque municipale de Carcassonne. Ce sont des œuvres gravées (Sonates, mélodies, symphonie…) léguées par Frédéric Lauth, ancien limonadier carcassonnais et président du comité Paul Lacombe de 1929. Mais aussi et c’est plus grave, des manuscrits de l’auteur qui sommeillent dans l’indifférence et dont la perte serait inestimable. A ce sujet, il y a également le manuscrit de l’unique opéra du compositeur carcassonnais Pierre Germain, « Simon de Montfort ». Cet ouvrage a été au début du siècle, donné dans le théâtre de la cité par l’orchestre du Capitole de Toulouse. La partition a souffert de la poussière et il conviendrait d’arranger la reliure.
Ces partitions font partie du patrimoine culturel de la ville et nous ne pouvons admettre de les voir ainsi remisées et si peu entretenues.
Au niveau artistique, Lacombe n’est plus au programme des orchestres nationaux. L’Harmonie municipale dont il a été un des fers de lance, ne joue plus ses œuvres depuis longtemps alors qu’il existe dans ses archives, des partitions du maître transcrites pour orchestre d’harmonie par leur ancien chef, Michel Mir. L’école de musique de la CAC ne s’est jamais posée la question de faire travailler à ses élèves des œuvres de Paul Lacombe et leur orchestre n’en présente pas à ses programmes. En ont-ils connaissance ? Si nous voulons réhabiliter la musique de Lacombe, c’est inévitablement par Carcassonne et l’Aude que doit commencer notre entreprise. Il nous appartiendra ensuite de la faire redécouvrir aux musicologues, universitaires, critiques et chefs d’orchestres nationaux. Cette démarche ne pourra aboutir sans une concentration de bonnes volontés accompagnées par la mairie et le Conseil général.
Il est à noter que le dernier concert suivi d’une conférence consacrée à Paul Lacombe remonte à 1984. Il s’agissait d’un répertoire pour piano et violon. Quant au dernier concert pour orchestre, il date des années 1960 grâce à Jean Alary alors directeur du théâtre.
Sauvegarder et éduquer
Veiller à une meilleure conservation des partitions gravées et manuscrites déposées à la bibliothèque municipale.
Faire en sorte que le directeur de l’école de musique propose l’étude de certaines œuvres à ses élèves. Il trouvera suffisamment de ressources dans le fond de partitions de la bibliothèque municipale pour de nombreux instruments : violon, piano, chant, orchestre, basson… Cela pourrait faire partie d’un projet pédagogique et l’orchestre de l’école pourrait travailler par exemple : la 2e symphonie en ré majeur, la marche dernière ou la Rapsodie sur des airs du pays d’oc. Cette dernière, véritable ode à notre Languedoc, a été interprétée par la Garde Républicaine en 1928 pour les fêtes du Bimillénaire de la cité en présence du Président Gaston Doumergue.
Il y a très peu de partitions encore en vente dans le commerce mais on peut louer le matériel d’orchestre chez les éditeurs et je possède un fond personnel de 50 œuvres différentes.
Faire découvrir sur le court terme
Je propose un concert, une exposition et une conférence pour le printemps ou l’été 2010 que vous trouverez dans un dossier de presse en annexe. Cette manifestation pourrait également permettre l’ouverture au public de la maison natale du compositeur située en face du square Gambetta. C’est là qu’il reçut les plus grands musiciens français de son époque : Massenet, Chabrier, Fauré, Bizet…
Ce concert devrait peut-être aussi être repris par le Conseil Général pour une tournée dans les villes et villages du département.
Pérenniser sur le long terme
Pourquoi n’envisagerions-nous pas un festival de musique classique qui prendrait le nom de Paul Lacombe ? Au printemps peut-être, là où la concurrence des festivals ne fait pas encore rage, autour d’une programmation de différents compositeurs en y incluant bien sûr des œuvres de Lacombe. Cela se fait parfaitement à St-Félix Laugarais pour De Séverac ou à Pamiers pour Gabriel Fauré.
Autour d’éminents concertistes, nous pourrions faire participer les élèves de l’école de musique de la CAC et mettre en valeur de nouveau talents issus de notre ville. Un concours avec une remise du prix « Paul Lacombe » pourrait aussi récompenser le meilleur d’entre eux. On peut aussi envisager une coproduction avec le festival Radio France de Montpellier et ainsi avoir leur orchestre à Carcassonne.
Enfin, la mairie ne pourrait-elle pas se porter acquéreur de la maison de Paul Lacombe pour en faire une annexe de l’école de musique ou une annexe de la future Médiathèque ?
Un premier succès
En juillet 2010, la ville de Carcassonne décide de programmer une conférence et un concert en l'honneur de Paul Lacombe au Musée des Beaux-arts, dans le cadre du Festival. J'interprète devant 300 personnes, des mélodies accompagnées au piano par Gilles Leconte de l'opéra de Limoges. La journée est une vraie réussite et suscite l'enthousiasme du public. Cela faisait cinquante ans que l'on n'avait plus joué Lacombe au festival. Malheureusement, aucun article ne paraissait dans la presse ; les journalistes étant trop occupés par les vedettes de variétés. Ce n'est que deux semaines après, que le compte-rendu que je rédigeais de ce concert était publié dans le journal, grâce à Joël Ruiz.
Une bataille
En septembre 2011, j'apprenais avec satisfaction que les Amis du musée Petiet de Limoux, allaient sortir un Cd de pièces pour piano de Paul Lacombe interprétées par Mlle Tranchant. Connaissant un peu cette pianiste locale, je lui téléphonais en lui indiquant que lors de mon dernier rendez-vous avec Monsieur Mercadal, j'avais proposé à ce dernier que nous puissions faire ensemble un concert au Festival 2011. Elle étant pianiste et moi chanteur, la complémentarité ferait une bonne communication pour la musique de Lacombe. De plus, il permettrait à son disque de se faire connaître. À ma grande surprise, la pianiste m'indiqua qu'elle avait récemment envoyé une demande de rendez-vous à ce monsieur parce qu'elle voulait jouer seule. La proposition de partager le concert en deux parties, dont une serait consacrée au piano solo, ne la fit pas revenir sur ses positions. Je compris dès lors que nous ne poursuivions pas les mêmes objectifs.
Quand son Cd sortit fin 2011, je fus un des premiers à l'acquérir. Si j'ai été agréablement surpris par la qualité d'interprétation de Mlle Tranchant, j'ai pris la mouche lorsque je me suis aperçu que le texte du livret avait été, mot pour mot, copié sur la notice Wikipédia que j'avais réalisée sur le compositeur. Le refus de Mlle Tranchant d'oeuvrer dans le même sens que moi, m'a décidé à faire protéger l'ensemble de mon travail pour en revendiquer la paternité. Depuis deux ans, je rassemblais à grand frais partitions et documents dans le but d'écrire une biographie de Lacombe. Je considérais, peut-être à tort et la passion m'emportant, que l'on voulait récupérer ce que j'avais mis sur pied. Finalement, les élus donnèrent satisfaction à Mlle Tranchant qui obtint son concert solo au festival avec des oeuvres de Lacombe, quand j'en fis de même avec des amis de l'orchestre symphonique du Limousin, quelques jours après au même endroit. Quand on met les oeufs dans le même panier, l'omelette n'en est que plus grande et belle... Tout le monde n'a pas les même idées, c'est dommage.
Dès lors, Mlle Tranchant va continuer dans son coin à donner des concerts à Limoux (Musée du piano), Pennautier (Na Loba), à la fête de l'oignon à Citou... Elle va faire jouer du Lacombe à sa classe de piano à l'École de musique. Toutes ses entreprises contribueront à faire connaître le compositeur, mais elles porteront un discrédit sur la capacité de deux musiciens à s'entendre alors qu'à priori ils devaient poursuivre les mêmes buts. À partir de là, le projet que je portais commença à décliner dans la tête de MM. Tarlier et Mercadal. Je dois même avouer qu'ils se sont rangés du côté de la pianiste, peut-être pour avoir la paix...
Nous aurions pu et dû faire jouer du Lacombe aux Cabardièses de Pennautier, où le gratin des pianistes internationaux se produit chaque année. Mais, peut-être n'ont-ils pas voulu de cette pianiste reconnue dans le Carcassonnais...
Un site internet
Au printemps 2011, j'ai conçu un site internet à mes frais et sans aucune subvention. Depuis 4 ans, je paie le nom de domaine et les frais d'hébergement.
www.paullacombe.com
La maison natale
© Chroniques de Carcassonne
Je me suis battu depuis 2009 pour faire connaître la maison de Paul Lacombe, située en face du Square Gambetta. J'ai proposé au Président de la Communauté d'agglomération que la collectivité l'achète pour en faire un Centre culturel dédié à la musique. Finalement, M. Tarlier voulut l'acquérir pour les réserves de la Bibliothèque municipale au cours du déménagement de celle-ci. Le prix fit reculer l'élu qui préféra Montquiers pour remiser les documents de la future médiathèque. J'écrivis également au Ministère de la culture dans le but de faire la faire comme Maison des illustres. La réponse ne fut pas négative, mais quel pouvoir avais-je sur elle n'étant pas propriétaire, ni élu ? C'est avec un grand pincement de coeur que j'appris qu'elle allait être transformée en bureaux. J'ai aussitôt saisi l'ABF et le propriétaire afin qu'il conserve des éléments indissociables de son passé artistique. Ce fut fait. Aujourd'hui, cette maison fort bien rénovée a perdu toute son identité.
Une biographie
Avril 2013, je sortais une biographie du compositeur, à compte d'auteur et toujours sans subventions. Cela représente deux ans de recherches et de rédaction afin de synthétiser la vie de cet homme décédé à l'âge de 90 ans. Combien de déplacements aux archives nationales à Paris, à la médiathèque Malher ? Combien de contacts avec la Bibliothèque nationale d'Autriche, avec des collectionneurs de manuscrits ? Tout cela pour que deux membres de la Société des Arts et Sciences contestent publiquement sur un blog, le caractère inédit de cet ouvrage et de ses sources ! Cela n'a pas empêché ce livre d'être lu et reconnu à sa juste valeur, par plusieurs musiciens et musicologues. J'étais une seconde fois attaqué par la jalousie et l'égoïsme ; par ricochet, le projet Paul Lacombe prenait un autre coup.
Un concert symphonique
Pendant un an, j'ai travaillé avec un jeune chef d'orchestre qui venait d'enregistrer un Cd d'une oeuvre symphonique de Rabaud. Nicolas Couton s'intéressa énormément à la musique de Lacombe. Il reconstitua les parties d'orchestre de sa seconde symphonie en ré. À la demande de l'ADDMD 11 (Conseil général) et après plusieurs réunions, nous avions paraît-il l'aval des élus pour monter un programme symphonique au Festival 2014. Nicolas Couton et son agent artistique se mirent alors en quête d'un orchestre et de budgétiser l'ensemble de la prestation. L'orchestre de Sofia devait venir au festival pour interpréter plusieurs oeuvres du répertoire français, dont deux de Lacombe. Nous étions confiant, car le directeur de l'ADDMD nous donnait des gages de la part des élus. Finalement, j'ai appris par le directeur du festival début 2014 que jamais il n'avait été mis au courant de pareille entreprise. Par conséquent, il n'y aurait pas cette production à l'été suivant. Tout notre travail de plusieurs mois s'effondrait et on nous avait roulé dans la farine.
Radio-France
À l'automne dernier, je recevais un coup de téléphone de la programmation du Festival de Radio-France. L'organisateur ayant entendu sur Youtube la Sonate pour violoncelle que j'avais postée après son interprétation au Festival de Carcassonne, me demanda si je pouvais fournir la partition. Ce que je fis. Aussi, le 15 juillet prochain, elle sera jouée dans ce Festival de grande renommée par deux éminents interprètes. Pensez donc ! La première fois depuis cent ans... Dernièrement, j'ai offert mon livre à Alain Duault que j'ai rencontré à l'opéra de Limoges. Il ne manquera certainement pas d'en parler sur Radio Classique. Seul le journal l'Indépendant de Carcassonne a publié un entrefilet pour annoncer cet évènement. Son concurrent n'a pas donné de suite à ma demande. Quant aux collectivités locales et à la Fabrique des Arts, elles font toujours la sourde oreille...
______________________________
© Tous droits réservés/ Musique et patrimoine/ 2015