Marcellin Henri Fescourt, cinéaste biterrois né le 23 novembre 1880, était aussi Carcassonnais par sa mère. Nos recherches généalogiques ont abouti à cette conclusion. Le célèbre réalisateur des Misérables (1925), premier film porté à l’écran d’après le célèbre roman de Victor Hugo, passait dans sa jeunesse toutes ses vacances d’été à Carcassonne. Il fallait sans doute qu’il y ait une raison à cela. Nos investigations permettent désormais d’établir avec certitude qu’une partie de sa famille s’y trouvait. Mieux encore, les résultats obtenus identifient les rapports ayant existé entre Fescourt et d’autres personnages connus de notre ville.
Henri Fescourt est le fils de Marie Louis Charles Fescourt, professeur de lettres au collège de Béziers, et de Jeanne Marie Charlotte Magrou, native de Carcassonne. Son grand père maternel, Etienne Magrou, originaire de Moux, tient une boulangerie dans l’actuelle rue Cros-Mayrevieille à la Cité médiévale. À l’âge de 14 ans, le jeune homme quitte Béziers pour le lycée de Carcassonne afin de préparer le baccalauréat. Il a pour professeur de philosophie, le célèbre journaliste Gustave Téry et fréquente son cousin Henry de Monfreid (1879-1974), son camarade de classe. En compagnie de ce dernier, Fescourt s’éprend de chevalerie médiévale sur les remparts de la Cité. Bientôt, ils se reverront à Paris chez Antoinette, la tante Magrou1.
L'ancienne boulangerie d'Etienne Magrou dans la Cité médiévale. M. Vidal lui succéda puis la famille Bacharan.
Son intérêt pour le cinématographe semble se manifester à cette époque ; au cours d’une conversation, il apprend au début de 1896 que l’on a réussi à animer la photographie. Bachelier es-lettres, Henri Fescourt poursuit ses études juridiques à Paris à partir du mois de novembre 1899 et obtient sa licence deux ans plus tard. Tout en préparant son doctorat, il passe ses loisirs dans l’étude du contrepoint, de la fugue et de l’orchestration. De son propre aveu, ses parents ne l’ont jamais détourné de sa fibre artistique. Fescourt se présente à la Schola Cantorum sur les conseils de Guy Ropartz. Admis dans la classe de composition de Vincent d’Indy, son maître vénéré, il côtoie Eric Satie et Isaac Albeniz.
À Carcassonne, Henri Fescourt passe tous ses étés. Il a pour amis, le poète Carcassonnais François-Paul Alibert, futur directeur du Grand Théâtre de la Cité : "J’assistais à d’assez nombreuses projections dans la ville de Carcassonne où je passais tous les ans mes vacances, en juillet et en août. Là, après des heures brûlantes, j’allais, le soir, prendre le frais à la terrasse d’un café sous les beaux tilleuls […] Il arrivait qu’une main se posât sur mon épaule : celle du poète François Paul Albert qui habitait Carcassonne. »
Après son service militaire à Compiègne et Soissons, Henri Fescourt obtient un poste d’avocat stagiaire à la cour d’appel de Paris, puis d’attaché au parquet de la Seine. Il renonce à la musique pour laquelle il ne se trouve pas assez de talent, mais ne rencontre pas davantage de plaisir dans les plaidoiries qu’il donne au civil, au correctionnel ou au conseil de guerre. C’est tout au plus un gagne pain qui ne lui apporte pas grande fortune. Le jeune homme conserve cependant des liens avec les artistes de Saint-Germain-des-près, au café Bonaparte.
C’est à partir de 1912 qu’Henri Fescourt commence réellement à s’occuper de cinéma. La société Gaumont l’engage comme scénariste et le réalisateur Louis Feuillade le prend sous son aile. Ce dernier avait tourné quatre petits films muets dans la Cité de Carcassonne , aujourd’hui perdus, dont on conserve uniquement des cartes postales. Feuillade était natif de Lunel, comme le père de Fescourt. Il avait un temps usé ses pantalons sur les bancs du Grand séminaire de Carcassonne, actuelle école privée Saint-Stanislas. Très vite Gaumont propose à Fescourt de passer à la mise en scène et en l’espace de trois ans, ce dernier réalise plusieurs courts-métrages.
La Grande guerre perturbe pour un temps ses projets. Il élit domicile à Carcassonne chez Madame Limousis, 8 rue du Pont vieux. La boulangerie de ses parents a été vendue à la famille Vidal.
Après quelques projets avortés, Henri Fescourt travaille pour la «Société des Fils d’Art» . En 1921, il quitte la compagnie et rejoint le producteur Louis Nalpas à Nice pour développer un vaste programme de versions filmées des œuvres de grands auteurs français. Fescourt s’attèle à la l’adaptation et à la réalisation de «Mathias Sandorf» de Jules Verne, avec Romuald Joubé dans le rôle-titre. Premier grand succès d’une série de cinéromans qui vont faire du cinéaste l’un des derniers grands maitres de la fin du cinéma muet. Il dirige ensuite Gabriel de Gravone dans «Rouletabille chez les bohémiens» (1922) d’après Gaston Leroux et retrouve Romuald Joubé pour «Mandrin» (1923) de Arthur Bernède. Il est à l’apogée de sa carrière lorsqu’il tourne, en 1925, sa somptueuse version des «Misérables» de Victor Hugo, plus de quatre heures de film partagé en quatre époques, avec Gabriel Gabrio en Jean Valjean et Jean Toulout incarnant Javert. L’année suivante, il publie avec Jean-Louis Bouquet, «L’idée et l’écran», un manifeste sur l’esthétique dans le Septième Art. En 1929, il réalise «Monte Cristo» d’après Alexandre Dumas père, son dernier grand succès, avec Jean Angelo dans le rôle d’Edmond Dantès. Avec l’arrivée du cinéma parlant, le parcours de Henri Fescourt s’enlise inexorablement. Jusqu’au début des années quarante, il va encore tourner huit films qui passerons, pour la plupart, inaperçus par la critique et ne rencontrerons pas le soutient du public. Après le sans intérêt «Retour de flammes» (1942) avec Renée Saint-Cyr et José Noguéro, il abandonne définitivement les plateaux de tournage. Par la suite, de 1943 à 1946, il occupe une chaire à l’«École Technique de Photographie et de Cinéma». En 1945, il représente les techniciens à la «Commission de Contrôle des films». Parallèlement, il donne des cours à l’«Institut des Hautes Études Cinématographiques» (IDHEC) et ouvre un «cours de formation du comédien d’écran» dans le dix-septième arrondissement de Paris. (Site cineartistes.com)
Henri Fescourt meurt le 9 août 1966 à Neuilly-sur-Seine.
- Antoinette Magrou née Bernard en 1841 à Béziers avait épousé Emile Dominique, le frère du grand père maternel d’Henri Fescourt. Ses deux enfants, prénommés Jean (1869-1945) et Joseph (1883-1951) étaient donc ses cousins. Ils sont connus, l’un pour avoir été un grand sculpteur français, l’autre un très grand médecin biologiste. Pas étonnant que lors des visites à sa tante Henri Fescourt fît la connaissance de Jean Perrin, de Paul Langevin et des époux Curie. Antoinette Bernard était également la tante du grand botaniste français Noël Bernard (1874-1911), fils de son frère. Tous ces Magrou ont un point commun ; ce sont leurs origines du village de Moux dans l’Aude.
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Commentaires
Merci Martial,
Avec vos recherches et votre partage, nous sommes moins ignorants.
De grands personnages a Carcassonne
Merci pour vos recherches qui permettent de sortir de l'ombre et du passé cet homme plein d'imagination et passionné.
Bonjour Martiel Andrieu,
En Effet, Henri Frescourt était très lié à Carcassonne, par sa mère, une Magrou et par ses cousins. Mon père, Bernard Magrou, et mon grand'père, Charles Magrou m'ont parlé de mon arrière-grand'père, Alphone Magrou, fils du boulanger Etienne Magrou, et de toute une bande de cousins très liés dans leur jeune vie carcassonnaise, puis leur vie étudiante à Paris : mon arrière-grand'père Alphonse à Normal'sup, Jean Magrou le sculpteur, Joseph Magrou le biologiste et botaniste, Henri de Monfreid, et donc, Henri Frescourt.
Bien cordialement,
Marthe Magrou
Docteure en sociologie