Après le débarquement des troupes alliées en Provence le 15 août 1944, les unités de la 11e panzer division allemande - stationnées à Toulouse - se mettent en ordre de marche afin de gagner la vallée du Rhône. Dans l'après-midi du 22 août, elles entrent dans les villages de Maurens et Le Vaux à 4 kilomètres de Saint-Félix Lauragais où elles se rendent coupables de pillages et d'assassinats. Le jeune Antonin Escaffre est ce jour-là tué par la horde barbare forte de 3000 hommes, parce qu'il cherchait à s'enfuir. Son forfait une fois accompli, le convoi choisit de s'écarter de la RN 113 - régulièrement mitraillée par l'aviation alliée et les maquisards. Il emprunta alors un itinéraire à travers les routes de la Montagne noire afin de rejoindre la méditerranée. Est-ce celui-ci que l'on retrouve le lendemain dans l'Aude au village de Conques-sur-Orbiel ? La description qui sera faite de ces hommes semble en tous points semblable à celle de ceux ayant commis des crimes dans le Lauragais. Les témoins du massacre du 20 août au Quai Riquet à Carcassonne évoquent également des "Mongols" parmi les Allemands.
Il ne s'agissait pas en fait de Mongols mais d'hommes provenant de l'armée Vlassov, enrôlés dans la Wehrmacht. Parmi eux, on comptait des Géorgiens, des Russes, des Ukrainiens...
La légion du Turkestan
Ces hommes sous l'emprise de l'alcool se sont comportés comme des criminels partout où ils sont passés. Le 23 août 1944, le village du Conques-sur-Orbiel va subir la loi de ces barbares. Il n'existe que quelques lignes très vagues sur cet épisode tragique dans les ouvrages de références que nous avons consultés : La Résistance audoise (Lucien Maury) et La 2e guerre mondiale dans l'Aude (Julien Allaux). La chance de ce blog c'est de pouvoir encore recueillir des témoignages, alors même que les acteurs de cette triste histoire sont morts ou beaucoup trop âgés. Les travaux historiques se sont énormément concentrés ces dernières décennies sur les actions héroïques de la Résistance. Fallait-il cacher les choses les moins avouables ?...
Que s'est-il passé à Conques ?
Une réfugiée d'Alsace-Lorraine résidait à Conques-sur-Orbiel et s'y trouvait ce jour-là. Sa fille a recueilli son témoignage et me l'a transmis. Il corrobore et complète celui raconté dans le livre d'Annie Kochert-Bonnefoy "Ils voulaient vivre libre", que nous citerons à la fin de cet article.
Quand ce convoi arrive à Conques, j'habite dans la maison tout en haut du village, à la limite de celui-ci, au fond d’une toute petite impasse.
Ils fouillent les maisons... Ernest a peur pour les femmes, surtout Paulette , mais elle échappe aux troupes grâce à la couverture qui cache l’escalier ….. d’ailleurs ils ont trouvé une partie des pots de confit d’oie et ils sont fourbus et affamés ! Pendant ce temps je me suis accroupie sur le bord extérieur de la fenêtre de l’étage, prête à sauter plutôt que de tomber dans leurs mains !
Après le pillage de toutes les denrées alimentaires qu’ils ont pu trouver dans le village, ils font la fête toute la nuit et s’enivrent.
Ernest - un ancien de 14-18 - pense qu’ils vont finir par mettre le feu au village avec les gens dedans (il a vu cela en Russie). Il faut absolument trouver le moyen de fuir, le moindre bruit la moindre tentative de sortie provoquent des tirs nourris des soldats qui sont sur les toits.
Alors ils tentent de passer par les terrasses chez le voisin - un cordonnier - mais celui-ci leur avoue que sa maison est bourrée d’armes ; il y en a partout dans les planchers et les plafonds.
Toutefois les Mongols ont peur du maquis et n’osent pas s’aventurer en dehors du village : donc si l’on parvient à sortir de la maison en direction de la route de LASTOURS ils ne poursuivront pas le fuyard ; il ne devrait pas y avoir trop de problèmes car la forêt n’est pas loin.
Il faut attendre la nuit et se préparer. Paulette et Marcel, plus menacés, décident de partir seuls, le plus vite possible en utilisant un réseau de minuscules ruelles et de terrasses ; Marcel ouvrant la route, Paulette à sa suite quand tout va bien. Ils parviennent à sortir du village et à franchir l’Orbiel à pied.
Ils prennent la direction de Carcassonne et rencontrent le maquis au carrefour de Villegailhenc.
Ceux-ci se posent des questions, ils ne savent pas s’ils doivent intervenir pour libérer le village ou attendre. Marcel leur décrit la situation en donnant le plus de précisions possibles sur les occupants ; il leur dit les craintes d’Ernest mais leur conseille de rester sur place et de ne rien faire pour l’instant car ce serait trop dangereux pour la population. Il est alors convenu que le maquis va rester sur place à l’affut du moindre bruit anormal, de la moindre odeur ; dans le cas de tirs ou d’odeur de feu ils interviendront.
Marcel et Paulette repartent vers Carcassonne où ils trouvent refuge à la Gravette chez la fiancée de Marcel. Monsieur Bénazet est seul avec Louise car sa femme est partie chez son autre fille à Villanière dont les jumeaux nouveaux nés sont malades. À cause de la présence des Mongols et par manque de soins, un des jumeaux mourra. Paulette et Marcel vont rester là plusieurs jours …sans nouvelles de la famille.
Ernest, Juliette et Marie ont eux aussi réussi à se sauver : ils possèdaient la clé d’une barraque de vigne des Bauquier dans laquelle Paulette cachait sa bicyclette. Cette cabane n’est pas très loin du village : ils partent à la nuit par l’arrière de la maison, avec quelques vivres et une couverture jusqu’à cette cabane sur la route de LASTOURS et y passent la nuit (de toute façon Juliette ne peut pas marcher plus loin).
Un peu plus tard Ernest va jusqu’à la première ferme demander du secours et ils reviennent tous dans celle-ci, Juliette dans une brouette.Dans le village c’est la terreur ; les habitants se sont enfermés chez eux, le village occupé par des troupes très frustres, avinées et prêtes à tout : la directrice de l’école a été réquisitionnée pour cuisiner à ses messieurs les chefs, elle passe toute la nuit à faire des patisseries : tant qu’ils ont besoin d’elle elle ne risque rien ! Son mari cloitré dans la maison passe la nuit devant la porte de la chambre de sa fille.
Le cordonnier a réuni quelques hommes chez lui il est prêt à se servir des armes cachées chez lui... si nécessaire.
Finalement les Mongols partent plusieurs jours plus tard sans avoir commis d’autres dommages ,pressés qu’ils sont de remonter vers le nord …. Un vrai miracle.
Le lendemain du départ des Mongols, le médecin est passé afin d’apporter son aide partout où cela était nécessaire. Ayant été la première à voir arriver ces troupes, j'ai également vu qu’ils s’en étaient pris à deux gamines qui se trouvaient en bas de leur rue : c’est alors qu’une jeune femme Russe est sortie en hurlant et s'est interposée... les deux gamines ont pu s’échapper (c’est pour cette raison que je m'étais réfugiée sur la fenêtre de l’étage prête à sauter et à courir à travers champs plutôt que de me faire prendre à la maison).
Il faut préciser que cette femme, employée de ménage à la kommandantur avait été tondue quelques jours plus tôt ...malgré cela elle a courageusement défendu ces deux gamines !
Dans l'ouvrage ci-dessus, l'auteure à retranscrit le témoignage suivant :
La famille d'Alexis Belaud s'était réfugiée chez sa soeur, et les hommes s'étaient cachés sur les toits. André était resté avec les femmes et les autres enfants, dans une chambre. Ils avaient très peur... Ils entendirent frapper à la porte et durent ouvrir. Les Allemands envahirent la maison, et deux d'entre eux entrèrent dans la chambre, où la tante du garçon, encore très jeune et belle, fut contrainte, le révolver sur la nuque d'obéir aux ordres. Elle fut violée devant leurs yeux, alors qu'André tenait sur ses genoux deux enfants très jeunes qui pleuraient. Lorsque le SS termina sa besogne, il pria son compagnon de prendre sa place. Après avoir emporté quelques tricots et fouillé l'armoire, ils disparurent. Trois femmes dans le village furent violées ce jour-là...
La macabre épopée de ce convoi de la 11e division de panzers s'achèvera entre l'Ardèche et les Vosges. Entre temps à Blomac, ils tirèrent à vue sur les véhicules qui passèrent : MM. Colomb et Castans seront tués et Mme Castans, blessée. Le 24 août 1944, c'est à Rieux-Minervois que le village est pillée et que quatre otages périssent sous la mitraille des nazis : MM. Labatut, Amalric, Malrieu et Louis Cros.
Toute personne pouvant témoigner de ces évènements est priée de bien vouloir me contacter à l'adresse suivante : andrieu-martial@wanadoo.fr
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Commentaires
Ils sont aussi passés sur la 113 a hauteur de l 'allee de Pennautier des jeunes s'y trouvaient , l 'un d'eux a été tué (Albarel) mon grand pere invalide coincé dans un ruisseau n 'a pas ete inquiété , les militaires lui auraient meme offert une cigarette . On a retrouve encore dans les platanes de l 'allée des balles , les lames des scies à ruban ont en fait les frais .
il est intéressant de connaître les crimes qui ont été commis et surtout des personnes qui ont agit avec beaucoup de courage c'est un devoir de mémoire pour les innocents qui ont été martyrisés et tués ..merci a cette personne pour le témoignage qu'elle vous a transmis
Une autre partie de cette armée du Turkestan, à un triste bilan, le 21 août à Rimont dans l'Ariège, ils ont tués, brulés, pillés, ils ont eu 300 mort et plus tard 1200 prisonniers,par le colonel Bigeard, interné dans le camp de Rivel, ils participeront à la reconstruiront du pays.
N'aillant jamais pu retrouver leurs amis assassins
11. Panzerdivision :
generalleutant Wend von Wietershem (août 1943-mai 1945)
mai-22 juin 1944 : Q.G. de la division Libourne (réserve d'armée G)
22 juin-16 juillet 1944 : Dordogne (nombreuses exactions)
divisée en trois kampfgruppen :
- Bode (Hauptmann chef du 11. Panzer Aufklarung Abtelung)
- Wilde
- Hax
16-25 juillet 1944 : Toulouse, Q.G. Rouffiac-Tolosan, E.M. Saint Ferréol
25-31 juillet 1944: Castelnaudary, déployée sur les villages de Saint Papoul, Labastide d'Anjou, Pexiora, Revel, Castres, Albi.
15 août 1944 : départ (entrain pour les éléments lourds et par la N.113 plus sure que les axes secondaires)pour Nîmes et la Provence (ordre du 13 août 1944), par Carcassonne, Lézignan, Narbonne, Béziers, Montpellier ...etc.
Arrive en retard pour passer le Rhône, afin de contrer les forces débarquées en Provence (américaines et françaises).Retards dus aux actions des Maquis (pont et voies ferrées détruis ...etc.) Il semblerait que l'aviation alliée n'aurait pas été aussi présente que ça, lors du déplacement de la division dans le département de l'Aude...
Il ne semble pas que ce soit des éléments de la 11e Panzerdivision, cité plus haut.
A ma connaissance, il n'y avait pas d'éléments "Mongols" dans cette division ...
Mes Parents et grands parents habitaient Marseillette, ils racontaient la peur qu'ils avaient eu et l'inconscience dont beaucoup de villageois avaient fait preuve.
Un jour d'août 1944 un long convoi traverse le village, des camions non bâchés chargés de soldats allemands se dirigent vers Puichéric.... direction Narbonne ? Ils vocifèrent et font des gestes en direction des curieux qui se sont groupés devant leur maison. Les villageois sont Heureux c'est la débâcle !
L'un d'eux fait un signe et tient dans sa main un objet, dangereux peut être, mais pour fuir il est trop tard, le soldat le lance en direction du petit groupe où se trouve mes Parents, mon Pére le récupère à la volée ! Ouf ce n'était qu'une boîte de conserve du "singe" autrement dit du bœuf en gelée. Voilà un souvenir un peu plus doux à nos oreilles d'enfants, lorsque tant d'horreurs nous étaient contées.
Annie
Je pense que ce sont ceux dont me parlaient mon père. Ils ont traversé la partie Héraultaise du Minervois, par Olonzac ... Beaufort ... Aigne.... Aigues-Vives ... Agel et au delà . Ils ont dormi à Aigues-Vives et Agel. Mon père et deux de ses amis ont failli être abattus , mais ont réussi à fuir. ils ont pillé, abandonné des véhicules hors d'usage, volé des cheveaux , un d'entre eux est mort, il a été enterré au cimetière d'Aigues-Vives, le corps a été récupéré par la famille dans les années 50 (un Allemand) . Une femme aurait été violée sur le village d'Agel ...
... Ma mère, originaire du village d'Argeliers (11), me racontait qu'une colonne Allemande avait été attaquée et mise à mal, de nombreux véhicules détruits, par des avions (G.B ? U.S ???) sur la très longue ligne droite qui va du Hameau de Cabezac au pont qui enjambe le canal du Midi après Argeliers ...
Je rejoins l'ami JPP, pas d'éléments mongols dans cette Pz.Div.
Par contre il est vrai que l'Aude reçu deux Ost Bataillon basé entre autre sur le littoral pour la défense et la surveillance de la côte, et oui des exactions et des viols sont à déplorer pendant leur présence dans ce secteur.
Merci SLN, en effet l'Aude a "hébergée" ces unités qui retraitent au mois d'août 1944 vers la vallée du Rhône.
En 1943, les ostruppen (Russes)composés d'ostbataillonen et les oslégionen (arméniens, azéris, géorgiens, caucasiens, azerbaïdjanais, tchétchènes, auzbeks,kazakhs, tartares) sont répartis dans le Sud de la France, rattachés aux divisions d'Infanterie (pratiquement toutes installées sur le littoral).
il y avait des régiments de sécurité (garde des monuments d'art, des gares, ponts etc...) leslandesschützen bataillonen, rebaptisés sicherungbataillonen toujours en 1943, composés déléments de l'Est.
on note que le freiwilligens starm regiment 1, positionné dans les zones de Castres, Albi, sur le Larzac en avril 1944, rassemblait en une seule unité, les georg.feld.batl I/370, georg.feld.btl I/9, et turkestanische.feld.btl I/370, fut envoyé dans la région de St Gaudens (09) du 29 juin au 19 août 1944. Il se pourrait que ce soit certains des ces éléméents qui se sont retrouvés sur la Minervoise lors de la retraite (en précisant que les régiments de sécurité basés à Toulouse étaient déjà partis, à la date indiquée plus haut).
et malgrès les combats de Rimont (09)
Désolé pour les petites erreurs de frappe, mon clavier est un peu réfractaire !
Mes grands parents (Lascorz) étaient épiciers à Conques a cette époque
Je suis le fils de "Paulette" la jeune fille à l'époque qui témoigne au début de cet article de ce qui s'est passé à Conques sur Orbiel.
Il manque au témoignage quelques éléments pouvant peut être apporter des renseignement sur la cette colonne :
Tout d'abord elle fut aperçue au loin sur la route descendant de la montagne noire mais sans pouvoir en distinguer le contenu exact ce qui eut pour effet que des habitants se rassemblèrent pour savoir ce qu'il en était; mon grand père Ernest était lui aussi présent.
Lorsque la colonne fut à demeure, les premiers éléments à pieds étaient des civils Allemands et des militaires très agés. Mon GP, Mosellan, maitrisant parfaitement le Prussien s'adressa à un type harassé et assez âgé, en tenue de la Reichsbahn (SNCF Allemande), afin d'avoir des renseignements sur ceux qui suivaient. La personne lui rétorqua poliment ; >
La personne lui rétorqua poliment ; >