Avant d’être nommé à Limoux, Gérard Persillon était entré à la police le 8 juillet 1942 comme commissaire 3e classe, 1er échelon. À l’âge de 23 ans, le gouvernement de Vichy l’affecte dans la sous-préfecture de l’Aude le 13 mars 1943, en remplacement de M. Devèze. Contrairement à ses collègues, Persillon se détourne clandestinement des ordres reçus de ses supérieurs tout laissant croire à sa loyauté envers Pétain. A l’instar d’Aimé Ramond à Carcassonne, il sauve à plusieurs reprises la vie de nombreuses personnes en intervenant en sa qualité de policier.
Un incident éclata par suite de la disparition d’un sous-officier allemand. Le commandant allemand avait demandé au Sous-Préfet et au maire, la désignation de 10 otages. C’est grâce à MM. Persillon, Commissaire de police et Marc, secrétaire en chef de la Sous-préfecture, tous deux appartenant à la Résistance, que cette désignation n’eut pas lieu. Ces deux fonctionnaires ayant obligé le Sous-Préfet et le maire de protester et de montrer aux autorités allemandes que le crime n’était pas certain puisqu’aucun corps n’avait été trouvé. Plusieurs personnes, parmi lesquelles la tenancière de la maison close, acceptèrent de témoigner faussement qu’un sous-officier allemand avait été vu ivre le soir de la disparition, se dirigeant vers la rivière. Le corps du sous-officier ayant été retrouvé à Pomas, dans le lit de la rivière quelques jours après, sans aucune blessure, l’affaire n’eut pas suite.
Le cambriolage du service de la carte d’identité de français, 28 avenue Achille Mir à Carcassonne, permet à Albert Marc et Gérard Persillon d’établir des faux-papiers. C’est dans ce contexte périlleux que ce dernier agit de manière décisive en faveur de Perla Hauszwalb, jeune fille de 14 ans de confession israélite. En fuite depuis la rafle du Vel d’Hiv, le 16 juillet 1942, au cours de laquelle sa mère et sa soeur furent internées puis déportées à Auschwitz, elle parvint à passer en zone libre. À Espéraza, Perla put retrouver son frère et ses oncles. L’un d’eux l’accompagna au collège de Limoux, où il expliqua la situation à sa directrice, Germaine Rousset née Viala (1891-1956). En toute connaissance des dangers mortels qu’elle encourait que cette femme l’accueillit et la protégea toute sa scolarité. Les faux papiers d’identité au nom de Perla Auswald c’est Gérard Persillon qui les lui fournit, comme il le fit pour tant d’autres personnes recherchées.
Germaine Rousset, directrice du collège de Limoux
En 1944, comme personne ne payait les frais d’internat de Perla, Germaine Rousset s’arrangea pour qu’une famille de la région l’embauche au pair pendant les vacances scolaires comme perceptrice des enfants. Par la suite, Perla fut nommée surveillante au pair à l’école.
Perla Hauszwald
Se sentant menacé, averti de sa future arrestation, le commissaire ne se présenta plus à son domicile, ni à son travail. Gisèle Médus, sa sténo-dactylo, en fit de même comme Albert Marc, le secrétaire de la sous-préfecture. Tous les trois passeront par l’Espagne avant d’embarquer sur le Gouverneur-général Lépine vers Alger afin de rejoindre La France Libre. L’enquête provoqua la révocation de Persillon par le décret, signé de Darnand : « Cette mesure a été prise à la suite du rapport de MM. les inspecteurs de police Got et Jougla, adressé le 9 juin 1944 à M. Le commissaire divisionnaire, chef régional des services de sécurité publique dont ci-joint copie, et sur avis de M. l’Intendant du maintien de l’ordre. » Gérard Persilon arriva à Casablanca le 2 juillet 1944 et à Alger le 11 juillet 1944. Après la Libération, la République le réintégra dans ses fonctions. Il passa sa retraite dans le village de Saix dans le Tarn. Le mémorial de Yad Vashem lui décerna le diplôme et la médaille des Justes parmi les Nations ; le ministre des Anciens combattants le fit Chevalier de la légion d’honneur en 2014. Gérard Persilon est décédé le 17 novembre 2018 à l’âge de 98 ans.
Kader Arif remet la légion d'honneur à G. Persillon.
Perla occupa un poste de surveillante du collège de Limoux après la guerre. Elle se maria puis émigra aux Etats-Unis. Elle revint en 1998 à Limoux afin de retrouver ses amis.
Sources
Comité Français pour Yad Vashem
Archives de l'Aude / 106W9
Rapport du sous-préfet de Limoux L. Cassan
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