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Le carnaval qui ne s'était pas mis sur son 31

En 1931, les Carcassonnais si prompts à faire la fête n'avaient pas tout à fait le cœur à l'ouvrage... Le pays ressentait vivement les conséquences de la crise économique de 1929 engendrée par l'énorme crack boursier. Alors, les organisateurs allaient jouer sur cette thématique pour tenter de conjurer le mauvais sort. Le propre d'un carnaval n'est-il pas de rire des malheurs de l'actualité politique ? Déjà, avaient-ils changé l'intitulé du comité des fêtes en "Fêtes de charité". Tout un programme... Néanmoins, sous la présidence de Faustin Farges et Louis Rigaud, la "Société de bienfaisance et de charité" mettait un point d'honneur à organiser un mois de réjouissances, du 14 février au 15 mars. Tout n'était durant cette période que Corso fleuri, défilé carnavalesque à Saint-Gimer, bals, concerts... Que de concours ! Celui des chars et des voitures fleuries pouvait faire gagner jusqu'à 8000 francs de prix. Celui des plus beaux travestis jusqu'à 1500 francs et de nombreux lots offerts par les commerçants locaux. Ne nous y trompons pas ; tous les commerces jouaient le jeu et prenaient une publicité dans le programme des festivités. Le dernier jour, Sa Majesté Carnaval était brûlée  au Portail des Jacobins, après un jugement des plus fantasques.

Carnaval 1931 .jpg

Sa Majesté Carnaval XII n'avait pas la tête des beaux jours. Vêtu d'une blouse bleue et de chaussettes noires, son allure était pitoyable. Il a l'air abattu devant l'entrée d'une banque qui lui a tout pris. En occitan, on peut lire "Banco routo" (Banqueroute), ce qui signifie que la faillite a été frauduleuse. Sur la grille, le mot "Estampat" prend ici une double idée... "Es tampat" séparé veut dire "C'est fermé. "Estampat" attaché veut dire "Trompé, abusé". Le message politique est clair et le responsable clairement désigné.

Programme 1931.jpg

Sur le programme dessiné par le caricaturiste Dantoine, membre du comité, ont voit un colombin de Limoux en train de réconforter le paysan ruiné. Toujours devant la banque, il se lamente sur son triste sort :

L'argen couflabo moun débas dé lano

Eri coussut

Es déscouflat moun débat dé lano

Lé Bansuié ès bengut

"L'argent gonflait mon bas de laine ; il était cossu. Il est dégonflé mon bas de laine ; le banquier est venu."

place carnot 1931.jpg

Place Carnot devant la pharmacie Sarcos

Collections

Charles Camberoque

Martial Andrieu

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Commentaires

  • Merci Martial. Très bien documenté.On savait rire dans ces temps-là.Toutes les occasions de se rassembler et faire la fête ensemble étaient bonnes. Aujourd'hui on communique à distance dans un petit groupe d'amis en ignorant les autres. Qui oserait prendre l'initiative d'organiser une fête carnavalesque susceptible de rassembler la population carcassonnaise ?

  • Èri cossut = J'étais cossu ! Merci pour ce rappel carnavalesque et peut-être nous en donnerez-vous d'autres ?

  • c'était bien sympathique de se retrouver sur les boulevards à voir passer les chars ,musiques et pandores ----les gens se rencontraient -on connaissait les visages !! aujourd'hui on ne se regarde plus car on "communique ""par machine interposée-- bientôt ,nous ne saurons plus rire et ne connaitrons même pas le mot ---

  • C est avec une grande nostalgie que j’ai lu votre superbe récit.
    Quel ravissement de voir ces chars magnifiques sur les Grands Boulevards !
    C’etait un grand moment de bonheur,de convivialité et de partage.
    Les temps ont bien changé depuis cette merveilleuse époque.
    C’est fort dommage et très regrettable.

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