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Evêques

  • Mgr Paul-Félix Beuvain de Beauséjour (1839-1930), évêque de Carcassonne

    Paul-Félix Beuvain de Beauséjour voit le jour le 16 décembre 1839 à Vésoul (Haute-Saône), diocèse de Besançon. Son père Louis-Ernst (1811-1859) exerce la profession d’avocat et sa mère Eugénie, née Fyard de Mercey (1813-1907), élève ses quatre enfants. Après des études à Saint-Sulpice, le futur évêque de Carcassonne est ordonné prêtre le 6 janvier 1863 et débute comme professeur à la « Catho ». C’est ainsi que l’on appelle l’Institution Saint-François Xavier.

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    Paul-Félix Beuvain de Beauséjour

    Successivement curé de Vitrey (1874-1876) puis de Luxeuil (1887-1892), Paul-Félix Beuvain de Beauséjour devient ensuite archiprêtre de la cathédrale et vicaire de Besançon, avant d’être élu le 9 juin 1902 évêque de Carcassonne. Les querelles entre le Pape et Emile Combes, président du Conseil des ministres, retarderont l’arrivée de Mgr de Beauséjour dans l’Aude de deux ans. Finalement sacré le 20 mars 1904 à Vesoul, il sera intronisé le 7 avril suivant à la suite du décès de Mgr Billard.

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    Le nouvel évêque, l’un des derniers concordataires, garda les armoiries de sa famille timbrées de la couronne comtale. L’écu de Monseigneur posé sur la crosse, on y remarquait un St-Paul sur la volute. Sa devise : « In laboribus plumiris »

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    « D’azur au sautoir d’or accompagné de quatre étoiles de même et chargé en cœur d’un bœuf de gueule. »

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    Tout au long de son ministère, Paul-Félix Beuvain de Beauséjour fit de gros efforts pour développer le recrutement de prêtres pour le département. Ceci, grâce à la création et à la promotion d’écoles presbytérales pour susciter des vocations.

    Le 16 juillet 1907, il est reconnu coupable par le tribunal d’avoir procédé le 2 juillet précédent au mariage religieux dans l’église de Grèzes de Joseph Maraval et de Marie-Antoinette Fondi de Niort, sans avoir justifié d’un acte préalablement reçu par l’officier d’état-civil. Or, à cette date le service d’état-cvil avait été suspendu à Carcassonne en raison de la démission du Conseil municipal, suite aux instructions du Comité d’Argeliers opposé au gouvernement lors de la révolte vigneronne de 1907. Monseigneur l’évêque ayant enfreint les articles 190 et 200 du code pénal maintenus par la loi du 9 décembre 1905, est condamné d’abord à 50 francs d’amende avec sursis, puis en appel à 16 francs - toujours avec sursis.

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    Le cortège funèbre le 10 avril 1930, place Carnot

    Le 5 avril 1930, Paul-Félix Beuvain de Beauséjour s’éteingnit à 5h30 du matin à Carcassonne après une longue agonie. Le doyen de l’épiscopat français avait 91 ans et venait d’écrire un ouvrage sur les Clermont-Tonnerre de Franche-Comté. Ses obsèques furent célébrées le jeudi 10 avril dans la cathédrale Saint-Michel sous la présidence de Mgr Binet, archevêque de Besançon.

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    Sa dépouille mortelle repose encore aujourd’hui dans le chœur de la cathédrale aux côtés de son prédécesseur. C’est son coadjuteur, Mgr Emmanuel Costes (1873-1934) qui lui succéda pour une année avant d’être nommé à l’archevêché d’Aix-en-Provence.

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    Mgr Emmanuel Costes, à l'arrière du corbillard

    Sources

    Armorial des cardinaux, archevêques et évêques français / Cosson / 1917

    Le figaro, L'Excelsior

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    © Tous droits réservés / Musique et patrimoine / 2020

  • Mgr Pierre Marie Puech, l'évêque des ouvriers de l'Aude

    Pierre-Marie Puech naît le 8 mars 1906 à Mazamet au cœur de l’industrie de délainage où son père Albert exerce la profession de commissionnaire. Après ses études secondaires à l’école Barral à Castres, le jeune séminariste est ordonné prêtre le 2 juillet 1930 à l’âge de 24 ans. Un an après, l’évêque du diocèse lui confie pour mission d’ouvrir une colonie de vacances pour petits séminaristes à la métairie de Pratlong. Ce domaine avait été légué par le maquis de Villeneuve à l’évêché du Tarn. A cette époque, l’abbé Puech enseigne à l’école catholique Barral, dont il deviendra le directeur à partir de 1937 et jusqu’en 1947.

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    Ecole Barral à Castres

    Au moment l’armistice de juin 1940, Pierre-Marie Puech dit avoir d’abord admiré, comme la majorité de français, les paroles « dignes et courageuses du maréchal Pétain, puis ses appels au pays pour qu’il retrouve le sens du sacrifice. » Toutefois, nuance t-il, « les mesures prises par Vichy à l’encontre des juifs, les tentatives pour une « Jeunesse unique », le texte de la « Charte du travail » avaient provoqué un réel désenchantement. » Au sein de l’école Barral, on ne se mêlait pas de politique en raison de la diversité des opinions dans l’établissement. Certains professeurs écoutaient Radio-Londres, quand d’autres voulaient faire de la propagande pour la Légion de Pétain. Jamais on ne chanta « Maréchal, nous voilà ! » lors du salut aux couleurs chaque dimanche. C’est dans cette atmosphère de suspicion que l’école vécut sous la menace d’une fermeture. C’est surtout au sein de cette institution que l’abbé Puech va sauver la vie à plusieurs personnes de confession juive. Parmi le corps professoral, se trouvait Marcel Bernfeld qui enseignait l’Anglais et que l’abbé logea en dissimulant son identité sous le nom de Bernède. Il y avait également l’élève Henri Englander, auquel on fit un faux certificat de baptême sous le nom d’Anglade. Ces israélites assistaient aux messes et au cours de religion, sans leur demander d’en changer. Si on avait prévu de les interroger sur leur instruction chrétienne, on leur avait donné les réponses avant le cours. Le jeune Englander âgé de 15 ans qualifiera l’abbé Puech de « Tsadik », ce qui signifie en Hébreu : « Juste ». Dans les maquis de la Montagne noire, les prêtres de Barral allaient parfois dire la messe lorsqu'ils étaient sollicités.

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    Mgr Puech, à droite

    Le 7 juin 1947, l’abbé Puech est nommé évêque auxiliaire d’Albi par le Pape ; il sera consacré le 24 septembre de la même année dans la cathédrale Sainte-Cécile. Il devient évêque de Carcassonne le 18 mars 1952 et succède à Mgr Pays, décédé quelque temps plus tôt. En 1959, il est invité à participer à Rome aux quatre sessions du Concile Vatican II qui va réformer l’église catholique romaine pour les décennies à venir. Les positions de Mgr Puech demeureront sur un plan idéologique assez conservatrices. Il considère par exemple que l’amour pour Dieu s’exprime pleinement dans le célibat des prêtres. Sur les questions éthiques, comme celle de l’I.V.G, il s’exprime ainsi au début des années 1970 :

    « Les chrétiens ne sauraient demeurer silencieux et inactifs. Ils feront la preuve qu’un enfant peut toujours trouver sur son chemin quelqu’un qui l’aime. Notre fidélité à l’Evangile est en cause. Tuer une cellule initiale, si ténue soit-elle, c’est un meurtre. »

    Ce caractère conservateur doit être nuancé, car Mgr Puech procéda à la première ordination d’un diacre, père de nombreux enfants, dans la cathédrale Saint-Michel. Il fit également en sorte d’assouplir les positions de l’église sur les mariages mixtes.

    Sur le plan social, l’évêque de Carcassonne n’hésite pas à se ranger du côté des pauvres et du monde ouvrier à chaque fois qu’il lutte contre l’injustice sociale. « L’attention privilégiée aux petits et aux pauvres n’attire pas toujours les sympathies », écrit-il. Au mois de mai 1968, Monseigneur Puech prend parti pour les ouvriers en grève et approuve l’abbé Cazaban, Supérieur du lycée Saint-Stanislas, qui tolère des manifestations d’élèves avec drapeaux rouges et noirs. Mentionnons que quelques prêtres se trouvaient aux premiers rangs des cortèges et que deux professeurs laïcs d’obédience trotskiste enseignaient à Saint-Stanislas. Dans ce même lycée, Mgr Puech et le vicaire Mazière s’opposent en 1971 à Maurice Grignon, le président de l’Association responsable de la gestion financière de l’établissement. Ce dernier reproche la qualité de l’enseignement catholique qui est dispensée aux élèves ; l’évêque lui répond : « Qui est plus qualifié que l’évêque pour juger du caractère catholique d’un établissement ? » Le chanoine Alcouffe, directeur de l’enseignement libre, dénoncera la convention qui liait Stanislas à l’association d’expansion. Le fondateur de ce groupement, Maurice Capdevilla, fit savoir qu’il ne céderait pas devant l’évêque : « Cette école nous colle à la peau. Nous nous battrons jusqu’au bout. » Plainte fut déposée pour pour dénonciation abusive de contrat.

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    Mgr Puech regretta la fin des prêtres ouvriers. Dans le cadre de ses fonctions, il intervint à plusieurs reprises auprès du patronat. Dans ce Lauragais où les gens vivaient encore dans des maisons au sol en terre battue et sans eau courante. Dans un lettre pastorale, Il invita les propriétaires agricoles à inciter leurs ouvriers à se syndiquer. De son point de vue, c’était un moyen pour que ceux-ci s’affranchissent de leur misère en faisant la promotion de l’agriculture. Ce langage fut difficilement admis par ses interlocuteurs. 

    A Chalabre, il se rend la nuit pour discuter avec le patron d’une usine.

    « J’ai toujours pris soin de dire et de redire que je n’intervenais pas pour prendre parti dans des revendications salariales, mais uniquement contre le dureté de certaines conditions de travail ou pour le dialogue entre ouvriers et patrons. »

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    Une grève s’éternisait à la SOMECA sur la route Minervoise à Carcassonne. Mgr Puech reçut le dirigeant de l’entreprise Michel Talmier à l’évêché, mais celui-ci ne voulut rien entendre des revendications des ouvriers. Il expliqua à l’évêque comment parti de rien, il avait fait de cette usine l’une des plus importantes de l’Aude. La situation empira, à tel point, que les employés séquestrèrent leur patron dans son bureau. Au milieu d’une vingtaine de maires et de conseillers généraux, d’un député, apparut Mgr Puech à 14 heures au milieu de l’usine. La stupéfaction fut totale auprès des journalistes sur place. Dans le bureau du patron assiégé, l’évêque tenta une nouvelle fois de le raisonner, sans succès. Le préfet réussit à venir à bout de l’entêtement de Michel Talmier, car sans reprise de l’activité la SOMECA risquait de perdre un importante commande de l’Etat pour l’armée française. L’action mal comprise de l’évêque, lui vaudra la qualification « d’Evêque rouge », inscrite en graffiti sur les murs de la ville.

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    A l’âge de 75 ans, celui qui avait refusé d’être nommé cardinal et archevêque - ce poste alla finalement à Mgr Marty, archevêque de Paris - donna sa démission au pape en 1981. Cette disposition était prévue dans le droit canon. C’est Mgr Jacques Despierre qui le remplaça comme évêque de Carcassonne en 1982. Avant de mourir le 1er janvier 1995, Pierre-Marie Puech se vit décerner le titre de « Juste parmi les Nations » par le Mémorial de Yad Vashem pour avoir sauvé des juifs pendant l’Occupation.

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    La tombe de Mgr Puech dans la cathédrale Saint-Michel

    Sources

    Témoignages pour l'histoire / P-M Puech / Siloë

    L'église persécutée / Sergio Grossu / 2002

    Vichy et les Justes : l'exemple du Tarn / Ed. Privat / 2003

    Vie sociale / CEDIAS / 1982

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