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Inédit ! Il y a 129 ans, était créée la Bourse du Travail de Carcassonne.

Afin de mettre un terme aux Bureaux de placements privés jugés comme esclavagistes, le monde ouvrier s’active et tente de se regrouper dans le but de faire entendre sa voix. La première Bourse du Travail avait été créée à Paris le 3 février 1887 suite à une décision du conseil municipal. Ce mouvement se fortifie ensuite et s’internationalise encore davantage lors de la création du 1er mai.  Cette manifestation est surtout faite pour montrer à tous et principalement aux gouvernants des différents pays qu’il y a dans l’ancien comme le nouveau monde, des milliers et des milliers d’ouvriers, d’hommes, dont la situation est loin d’être parfaite, qui réclament contre cette situation, l’amélioration de leur sort.

C’est en 1889 que la décision fut prise à Paris, de consacrer la journée du 1er mai à une grande manifestation ouvrière, et voici dans quelles circonstances : Au mois de juillet 1889, un grand congrès international socialiste se tint à Paris, dans la salle du théâtre des Fantaisies-Parisiennes, rue Rochechouart. Des représentants de tous les pays étaient venus. Vers la fin de la séance du 20 juillet, un délégué américain prit la parole et demanda qu’on votât une proposition de fête internationale, à une démonstration annuelle en faveur des revendications ouvrières. Cette proposition fut approuvée et l’on discuta alors sur la date à choisir. Serait-ce le 14 juillet, le 13 mars, le 21 septembre ? Le délégué américain proposa le 1er mai. Après une discussion orageuse, la résolution suivante fut mise aux voix :

« Il sera organisé une grande manifestation internationale à date fixe, de manière que, dans tous le pays et dans toutes les villes à la fois, le même jour convenu, les travailleurs mettent les pouvoirs publics en demeure de réduire légalement à huit heures la journée de travail et d’appliquer les autres résolutions du congrès international de Paris. Attendu qu’une semblable manifestation a déjà été déclarée pour le 1er mai 1890 par l’American Federation of Labour, dans son congrès de décembre 1888, tenu à Saint-Louis, cette dates adoptée pour la manifestation. »

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La première Bourse du Travail de Carcassonne, bd Barbès

Après la création de la première Bourse du Travail en province à Saint-Etienne en 1892, une dizaine d’entre-elles vont essaimer dans tout le pays. La capitale audoise figure parmi celles-là et adhère à la Fédération des Bourses du Travail en France lors du Congrès de Saint-Etienne. Dès lors la Bourse du travail de Carcassonne est créée le 17 mars 1892 par les groupes corporatifs formant le syndicat mixte professionnel. Son siège se trouve au Café Durand, 33 boulevard Barbès. Les Carcassonnais l’ont connu sous le nom de Café des Américains. Son Comité général se compose de trois de délégués de chaque syndicat ou groupe corporatif adhérent, divisé en plusieurs commissions : finances, exécutive, statistique, contrôle, propagande et autres. Un secrétaire général et un secrétaire adjoint sont chargés du fonctionnement de la Bourse, mais lors des réunions c’est un délégué nommé à chaque séance qui officie. Un bureau de placement gratuit pour les deux sexes est installé à la Bourse qui a, par ses relations, rendu de grands services à la classe ouvrière de Carcassonne et de la région. Il s’accompagne d’une bibliothèque à la disposition des travailleurs, ainsi que d’une caisse de secours pour les ouvriers syndiqués de la ville et ceux de passage. Grâce au dévouement des délégués, des cours professionnels sont dispensés dans le local. Ce qui la diffère des autres Bourse du travail en France, c’est qu’elle vit uniquement grâce au produit des travaux et des cotisations du syndicat mixte professionnel et syndicats adhérents. Ceci sans aucune autre subvention qui pourrait subvenir aux besoins de ses activités. Elle fait partie de la Fédération des Bourses de Travail de France et participe aux nombreux congrès visant à améliorer le bien-être de la classe ouvrière. Elle fonde à Carcassonne le syndicat des charpentiers, et sert d’arbitre dans plusieurs différents survenus entre ouvriers et patrons.

C’est la Bourse du travail de Carcassonne qui fait aboutir en septembre 1892, la grève des ouvriers plâtriers de la ville par des secours pécuniaires votés par les délégués et par une souscription publique faite à ses frais. Le 7 septembre 1892, la réunion tenue à la Bourse du Travail se conclue sur cette déclaration :

« La corporation des ouvriers plâtriers, voulant revendiquer un minimum de salaire, s’est trouvée en présence d’une certaine catégorie d’exploiteurs qui non contents d’affamer l’ouvrier, veulent le tenir dans l’esclavage. C’est à nous, ouvriers de Carcassonne, de secourir par tous les moyens en notre pouvoir nos camardes dans leurs revendications. C’est dans ce but que la Bourse du Travail fait appel à votre solidarité, et ouvre une souscription publique. »

Les ouvriers plâtriers au nombre de 105 et sans lesquels il n’est plus possible de bâtir quoi que ce soit, réclament une augmentation de salaire de 0,40 centimes par heure. L’affaire ne tarde cependant à être réglée grâce au délégué Salvagnac et à M. Romet, secrétaire général délégué de la préfecture de l’Aude. Ce dernier organise une réunion entre les différents représentants des ouvriers et des entrepreneurs qui aboutit à un relèvement du salaire horaire à un franc ; ceci sans aucun désordre.

La Bourse du Travail apporte son soutien aux camarades mineurs de Carmaux en lutte : « Considérant que la grève qui vient d’éclater à Carcassonne n’est qu’une question politique, et ce n’est que de depuis que l’ouvrier mineur a renversé le baron Reille, surnommé le Roi de la Montagne, et son chambellan, le marquis de Solages, que la compagnie réactionnaire a fomenté cette grève et cherche à provoquer des désordres. Regrette l’attitude du gouvernement de la République ; envoie des félicitations à leurs camarades de Carmaux et vote la somme de 25 francs (Labatut, délégué du Syndicat Mixte Professionnel). »

Après la vente du café Durand, la Bourse du Travail se trouve contrainte de rechercher un nouveau local pour ses réunions. La municipalité lui permet de tenir ses assemblées dans l’Hôtel Courtejaire dont elle a hérité et qui deviendra plus tard l’actuel Théâtre municipal, Jean Alary. L’installation n’est que provisoire car la ville a de nouveaux projets pour ce bâtiment ; la Bourse du Travail va alors s’installer dans la Halle aux grains, en dessous de l’horloge de la rue de Verdun.

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La Bourse du Travail jusqu'en 1937

Elle sert principalement en ce début de XXe siècle de bureau de placement pour les métayers et tous ceux qui travaillent la vigne. Ses activités se poursuivent également dans le nombreux cours professionnels que ses délégués dispensent : Charpente, menuiserie, tailleurs d’habits, etc. Le nombre d’élèves oscille entre 39 en 1898 à 31 en 1900 et les enseignants ont pour nom : Prosper Roques, Louis Bonhomme, Jules Laurens, François Alès, Antoine Portal, Louis Rajol, Xavier Guillalmou, Régis.

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Contrairement à la Sous-préfecture narbonaise, la Bourse du Travail de Carcassonne n’aura jamais de bâtiment construit spécialement pour ses activités. Il faudra attendre le 3 juin 1937 pour la municipalité Tomey se décide à loger convenablement les syndicalistes de la ville. Elle fait l’acquisition de l’ancien Théâtre-Cinéma l’Eden sur le boulevard du commandant Roumens. Le bâtiment construit en 1911 par l’architecte Gordien possède une entrée des artiste donnant par l’arrière dans la rue Voltaire. C’est dans cet immeuble que s’installe la Bourse du Travail. Durant l’Occupation, le gouvernement de Vichy ayant interdit les syndicats, la mairie fait fermer le local et y installe à côté la Maison du Prisonnier. Après la Libération, les syndicats reprennent force et vigueur et occupent à nouveau leur local jusqu’aujourd’hui.

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Commentaires

  • Grace à cet article j'ai appris le but "des bourses du travail".
    Merci pour tout vos articles si richement bien documentés : je ne peux témoigner de mon "vécu" de Carcassonne, n'y étant pas née, n'y ayant pas vécu, mais grâce à vos articles elle me parait plus familière, et je pense que je la regarderai différemment quand on y reviendra en vacances.

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